Roger Milla est un icone du football. L’ancien Lion indomptable a marqué son temps et laisse de beaux souvenir au-delà même du Cameroun, son pays natal. Le journaliste Martin Camus Mimb est revenu sur son parcours, notamment celui de la Coupe du Monde en 1994.
Nous sommes en 1994. Le Cameroun vient de se qualifier pour la Coupe du monde aux États-Unis. Noyé dans l’euphorie du Mondiale 90, le public vit des rêves les plus fous. Il s’imagine plus loin encore que les quarts de finale. Problème, son héros de 90, Roger Milla a déjà 42 ans et vit une retraite presque paisible, entre matches de gala et autres invitations à travers le monde.
Il vit même une petite carrière musicale. Il est loin des aires de jeu. Le rêve sans Milla est-il alors possible ? Le public n’y croit pas. Est-il encore possible de voir Roger Milla sur l’aire de jeu à un âge aussi avancé ? Les doutes s’amoncellent, mais la rumeur enfle. Roger Milla doit revenir. La radio nationale l’unique à l’époque, y participe à sa façon, en distillant de temps en temps, les nouvelles du Vieux Lion, des nouvelles rassurantes sur sa forme.
Personne n’y croit, jusqu’à cette conférence de presse quand Roger Milla annonce son retour au sein du Tonnerre de Yaoundé. Entre doutes, pessimisme et espoirs, le public veut se rassurer, que Roger, reste Roger. Ça tombe bien, le derby avec le Canon est programmé au hasard du calendrier, au Stade Ahmadou Ahidjo.
Ce jour donc, les médias du monde entier débarquent à Yaoundé. Les camerounais des quatre coins affluent vers le stade. L’affluence est record, jamais enregistrée dans un match de championnat. Le stade est sous le poids de plus de 80 mille spectateurs. Les plus chanceux sont assis, les téméraires sont accrochés à ce qui peut l’être, poteaux électriques, panneaux d’affichage ou tout autre support. Il faut voir Roger Milla, pour croire de ses yeux, que notre Coupe du monde est assurée.
La fièvre du mondial est totale. Roger Milla et le Tonnerre sont en place, face à une équipe du Canon redoutable avec des jeunes loups qui dominent quasiment le championnat (Marc Vivien Foe, Serge Noah, Mbvoumin et autres).
Le match commence avec un Roger Milla légèrement replié au milieu pour aider avec son intelligence et sa clairvoyance ses jeunes coéquipiers. Mais le Canon installe tout de suite sa domination et mène à la mi-temps par deux buts à zéro.
Le public commence à désespérer, les débats sur la vieillesse de Milla enflent dans les tribunes. Avant d’entrer aux vestiaires, Roger s’arrête aux micros des journalistes et annonce que le Canon ne gagnera pas, qu’ils vont réajuster à la reprise. À peine lancée, la seconde période est accueillie par une réduction du score du Tonnerre.
Le meilleur est à venir. Roger Milla est monté en attaque. Ses chiens de gardes sont Marc Vivien Foe et Serge Noah l’actuel DTN entre autre. Un marquage à la culotte, qui n’empêche pas à Roger Milla de marquer le but d’égalisation. Le stade est en délire. Le Cameroun bascule dans la folie. L’Afrique a les yeux qui scintillent. Le monde est impressionné. Le reportage de ce match passera au journal de France 2. Roger Milla était de retour. USA 94 pouvait commencer. C’est la fièvre du Mondial.
Mais ce que beaucoup ne savent pas, c’est que Roger Milla pour être prêt, avait pris un préparateur physique personnel. Il ne s’entraînait qu’une fois avec le Tonnerre. Le reste était avec ses préparateurs personnels. Le Même procédé qu’il avait utilisé avant la Coupe du monde 90. Je vais le répéter, la Coupe du monde est une préparation personnelle avant d’être collective. Et même s’il n’a pas brillé comme en 90, il est au moins rentré avec un record qui court jusqu’à ce jour, celui du plus vieux buteur à une phase finale. Sa coupe du monde à lui était gagnée. Gagne la tienne au Qatar. Le monde te regarde mon cher jeune footballeur. C’est la fièvre du mondial !