En trois semaines, fin juillet, le Cameroun a subi cinq attentats-suicides dans l’Extrême-Nord. Si Boko Haram est suspecté d'infiltrer des mosquées et des écoles coraniques, le groupe recrute surtout des fillettes défavorisées qui n'ont aucune idée qu'elles transportent des bombes.
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Dans une communication adressée à son personnel en juillet, l’ONU dispensait des conseils afin de permettre d’identifier un kamikaze. Publiée par le département de la sûreté et de la sécurité des Nations unies au Tchad le 13 juillet, celle-ci a pour objectif de donner « des indications aidant à la détection d’individus suspects dont l’attitude suggère qu’ils sont porteurs d’engins explosifs artisanaux ».
Ayant potentiellement la « peau claire [dans] la partie inférieure du visage prouvant un rasage récent », « très concentré et vigilant, se parlant à lui-même (peut-être en train de faire sa dernière prière) », portant des « vêtements lourds et épais », le kamikaze, selon l’ONU, « marche avec détermination ».
Une description qui convient mal aux individus recrutés par Boko Haram, notamment au Cameroun. « Dans l’immense majorité des cas, les kamikazes de Boko Haram ne sont pas convaincus par l’idéologie », explique le colonel Didier Badjeck, porte-parole du ministère de la Défense camerounain.
Les kamikazes sont surtout des jeunes adolescentes vulnérables.
Vendeuses de dattes sans le sou, jeunes filles aliénées, fillettes faisant la manche, Boko Haram utilise des personnes issues des couches les plus défavorisées du Cameroun. Des jeunes filles, entre 13 et 15 ans, socialement très vulnérables. Comme ce fut le cas à Maroua le 22 juillet.
Contrairement au Nigeria, où des compagnes de combattants islamistes défunts franchissent le pas, la grande majorité des kamikazes au Cameroun ignoreraient même qu’elles portaient des explosifs, selon les autorités.
Bombes déclenchées à distance
Dans le nord du Cameroun, Boko Haram recrute sur place, avec une pragmatique intelligence, déplorent les enquêteurs. « Quelqu’un propose de l’argent à ces jeunes filles démunies pour aller se balader dans la rue avec un colis dont elles ne connaissent pas le contenu, qu’elles ne vont évidemment pas refuser, explique Didier Badjeck. Jusqu’au moment où, quand elles arrivent dans une foule, la bombe est déclenchée à distance. »
Lors des attentats-suicides perpétrés à Maroua et à Fotokol, les explosions ont été déclenchées par un tiers, selon les témoignages recueillis. D’autre part, les kamikazes sont souvent sous l’effet de drogues. Les personnes arrêtées avant le déclenchement de l’explosion s’effondrent ainsi régulièrement durant l’interrogatoire qui suit. Les crises de larmes sont fréquentes sous l’effet du manque ou tout simplement de la reprise de conscience.
Dans d’autres cas, plus fréquents au Nigeria et résultant des enlèvements de masse, les fillettes kamikazes « choisissent » de se donner la mort. Exploitées sexuellement – c’est probablement le cas des lycéennes enlevées à Chibok en avril 2014 -, elles voient dans la mort une issue à leur calvaire.
Vigilance envers les écoles coraniques
L’existence d’un « recrutement idéologique » au Cameroun n’est pas formellement établi. La surveillance des mosquées et des écoles coraniques a été renforcée car la police estime qu’elles pourraient être le lieu d’un endoctrinement.
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« Ces structures sont infiltrées et, dès qu’elles deviennent inquiétantes, elles sont démantelées », assure Didier Badjeck. Depuis début juillet, plusieurs écoles coraniques du Nord et de l’Extrême-Nord, à Maroua ou encore à Ngaoudéré, ont en effet été investies par la police. Les élèves ont été renvoyés dans leur famille, parfois après interrogatoire et détention, au grand dam des organisations de droits de l’homme.
Les dénonciations d’individus marginaux, et donc suspects aux yeux de la population, se multiplient également, alors que le Cameroun a mis en place une série de mesures drastiques, notamment à l’encontre des jeunes vendeurs ambulants, pour lutter contre Boko Haram. Un mal nécessaire, assurent les autorités camerounaises.