Après sa sortie de prison le 23 juillet 2015, où l’ancien maire Rdpc de la Mairie de Njombe-Penja a passé plus de 7 ans de détention ferme à la prison centrale de Douala, à la suite d’une kyrielle de condamnations fallacieuses les unes les autres, il se voit désormais un destin politique. Dans les tous prochains jours, on attend toujours l’annonce de la création de son parti politique.
I- Comme Charles Blé Boudé ?
Paul Eric Kingue va-t-il suivre les pas de Charles Blé Boudé ? Ce que laissent croire certaines indiscrétions. Depuis lundi 17 août 2015, c’est connu, le leader des jeunes patriotes a annoncé depuis sa cellule à la Haye où il attend toujours l’ouverture de son procès, «accusé de crimes contre l’humanité par la CPI», a annoncé la création de son parti politique. Il a décidé de transformer son mouvement le Congrès Panafricain des Jeunes Patriotes (COJEP) en parti politique. Et va se dénommer : «Congrès pour la Justice et l'Egalité des Peuples».
Charles Blé Boudé est ce jeune universitaire qui avait pendant la dernière crise post-électorale de 2010 mobilisé les jeunes ivoiriens pour protéger le régime du président Laurent Gbagbo, en les transformant en bouclier humain. Paul Eric Kingue va-t-il avoir un destin de Blé Goudé ou de Mandela ? Contrairement à Blé Goudé mais comme Mandela, il a été acquitté par la Cour suprême le 18 juillet 2015. Pour finalement sortir de la prison centrale de Douala, qu’il avait choisie comme centre de détention pour sa sécurité, le 23 juillet 2015.
Une sortie spectaculaire qui avait été auréolée par une mobilisation populaire d’hommes, femmes et enfants partis de la ville de Douala et de ses environs, notamment l’arrondissement de Njombé-Penja où il est perçu comme un martyr, afin de lui manifester leur soutien. Paul Eric Kingue, l’ancien Maire Rdpc de Njombé-Penja s’était vu interpeller aux lendemains des émeutes de la faim de fin février 2008. Déféré devant le Procureur de la République, il avait été placé sous mandat de dépôt à la prison principale de Mbanga et par la suite à la prison principale de Nkongsamba.
Pour le procès des émeutes de 2008, il avait été condamné en instance à 6 ans d'emprisonnement ferme, peine ramenée en appel à 3 ans par la Cour d’Appel du Littoral. Une second procédure avait été déclenchée pour un «prétendu» détournement de la somme de 1 400 000 F Cfa (Un million quatre cent mille F Cfa) ayant servi à l’installation de l’exécutif communal et d’une accusation de faux en écriture. Condamné dans un premier temps par le Tribunal de grande instance du Moungo, à 10 ans de prison, la Cour d’appel du Littoral l’avait déclaré non coupable, pour faits non établis. Cette procédure va durer 5 ans. C’est aussi elle qui était le prétexte de sa révocation. Le troisième procès, était une accusation d’un détournement d’une somme de 10 millions de F Cfa (Dix millions F Cfa). Dans un procès auquel il n’a été ni convoqué, ni entendu, et encore moins n’a comparu.
Il était reproché à Paul Eric Kingue, d’avoir en moins d’un an d’exercice de ses fonctions de magistrat municipal à la Mairie de Njombe-Penja, d’avoir distrait d’une part la somme de 4 960 000 F Cfa, don de la Société des Plantations de Mbanga (SPM) destiné d’une part à l’installation d’un réseau d’eau Snec à l’hôtel de ville de Penja, et d’autre part, plus de 5 millions F Cfa prétendument destinés à la location de la niveleuse de la Commune de Njombe-Penja à celles de Dibombari, Mbanga, et Melong. Le Tgi du Moungo l’avait condamné à perpétuité. La Cour d’Appel du Littoral a ramèné le montant à 3 000 000 F Cfa (Trois millions F Cfa). Ce sont la première et la troisième condamnations qui seront portées à la Cour suprême. Et qui ont abouti à sa libération en juillet 2015.
Lors de sa sortie de prison le 23 juillet 2015, il va faire des déclarations tonitruantes et prémonitoires à son avenir politique. En annonçant sans fioriture son retour sur la scène politique : «… dans les prochains jours, vous connaîtrez avec précision ma position sur ce sujet», avait-il déclaré solennellement à la presse.
Avant d’avouer quant à son militantisme au sein du parti au pouvoir qu’il va lui être très difficile «de repartir dans le Rdpc». Et de préciser que rien ne l’y attache «Je ne milite pas dans les partis avec les totems». Et pour cause, le Rdpc n’est pas un parti où on écoute sa population, et surtout les pauvres. Parce qu’il est convaincu qu’il a désormais une mission «divine» celle de défendre les opprimés.
C’est pourquoi, il indique ses prochains champs de prédilection : «Pour me résumer, je rentre en politique, je rentre dans les droits de l’homme.» Il va justifier cette décision : «Cette fois-ci, je rentrerai en politique avec une âme un peu plus dopée que les autres, pour défendre les Camerounais qui vont se voir piétiner partout. Pour défendre les Camerounais qui n’ont pas de voix, pour défendre tous ceux-là qui croient encore à un Cameroun juste».
Il ne fait pas de doute qu’il va faire du Mougo-Sud son fief de prédilection. Et singulièrement l’Arrondissement de Njombe-Penja qu’il connait du bout des doigts. A ce propos, il dit avoir identifié un certain nombre d’injustices sociales, une forme d’exploitation qui ne lui semblait pas manifeste. Avant de souligner que : «Si je laisse ce combat, ma conscience me jugera toute une vie. Puisque j’aurais l’impression d’avoir trahi mon peuple».
II- Une voie inévitable
Un engagement qu’il a promis mener à l’immédiat. «Je pense que c’est maintenant que le combat commence. Il commence maintenant parce qu’en réalité, je ne faisais pas la politique pour moi-même. Je faisais la politique pour les autres». Un signal fort pour comprendre qu’il n’est pas question pour lui de militer dans un parti où il aura une hiérarchie.
C’est pourquoi, il va réitérer cette vérité de Lapalisse : «Je ne peux pas continuer dans le Rdpc». Une décision rendue publique le 18 septembre 2014, dans une lettre ouverte au Président National du Rdpc, et par ailleurs président de la République, écrite aux lendemains des sanctions qu’il a prises à l’encontre d’une centaine de militants qui ont brillé par des comportements d’indiscipline pendant et après les élections couplées législatives et municipales du 30 septembre 2013.
Il avait exprimé sa surprise quant au silence observé sur son sort. Lui qui est un militant plus indigne que ses camarades sanctionnés puisqu’il était même condamné et privé de liberté depuis des années. C’est alors qu’il va révéler si besoin était au président National du Rdpc, Paul Biya qu’en fait il a «formellement démissionné du Rdpc en mars 2013, par lettre de démission servie par voie d'huissier de justice, au Comite central de ce parti où ont milité 80% des responsables dits de l'opposition au Cameroun» y compris le Chairman du Sdf Ni John Fru Ndi. Une précision qui était prémonitoire à son avenir politique. Puisqu’il insinuait qu’il ne serait pas superfétatoire pour lui aussi de rentrer dans l’opposition.
Pour justifier sa décision, il va soutenir que depuis que le rouleau compresseur a décidé à travers une avalanche de procédures judiciaires sanctionnées par des condamnations lourdes les unes, les autres ; il n’a plus eu «de 2008 à aujourd'hui (date de la publication de sa lettre ouverte), aucune relation n'a existé à quelque niveau que ce soit, avec les responsables du Rdpc».
Depuis cette annonce, et au regard de la ferveur populaire qui a accompagné sa sortie de prison, Paul Eric Kingue est courtisé comme une jeune fille à la plastique d’une reine de beauté par la hiérarchie du Rdpc pour une réconciliation et un retour en fanfare, surtout en cette période qui coïncide avec le processus de renouvellement des structures dirigeantes des organes de base. Les leaders des partis d’opposition ne sont pas en reste. Ils entendent exploiter cette popularité qui est indéniable.
D’ailleurs lui-même reconnaitra à sa sortie de prison : «Je suis satisfait et comblé de tous les soutiens que l’ensemble des camerounais m’a accordés durant ces moments difficiles». A en croire son entourage, c’est certainement ce qui ralentit encore ses ardeurs à annoncer le lancement imminent de son parti politique.
Mais pour d’autres, il est question de pour lui tout d’abord de jouir de sa liberté et de gérer toutes les épreuves qu’il a connues depuis ses années de prison. Avec le décès de son fils unique, la rupture de banc de son épouse et plus récemment le décès de son frère aîné qu’il a eu le bonheur d’inhumer contrairement aux obsèques de son fils qu’il n’a pas eu le loisir d’assister.
C’est avec impatience qu’on attend l’annonce de ce retour dans l’arène politique de Paul Eric Kingue et la bannière sous laquelle elle va se faire. Sans doute avec la création imminente de son parti politique. N’a-t-il pas clamé haut et fort qu’il est «un homme innocent, un homme innocenté, un homme qui mérite d’être réhabilité dans la société».
On attend bien de voir si cette société lui rendra bien cette réhabilitation et si la ferveur populaire observée à sa sortie de prison sera un capital qu’il saura fructifier en un poids politique considérable. En tout cas. Ce sont les responsables Rdpc du Moungo-Sud élus au sortir des renouvellements des structures dirigeantes des organes de base qui vont avoir à l’affronter. Et si à cela, il lui est versé la réparation exigée par la décision exécutoire du Groupe de Travail des Nations Unies d’un montant de 7 milliards de francs CFA.
Ce projet prendrait une dimension nationale voire même internationale puisqu’il y a eu des Camerounais de la diaspora qui se sont constitués dans un Comité de soutien dirigé par Hubert Picarne qui a su fédérer des gens pour sa cause en Europe. En multipliant des pressions au niveau international. Les négociations étaient à un moment en cours dans les coulisses.
Mais il se peut à en croire sa déclaration au sortir de la prison qu’elles ont été interrompues. «J’attends que l’Etat qui m’a privé de huit années de liberté n’attende pas que je vienne vers lui pour réparer» susurrait-il.
On peut comprendre aussi pourquoi dans l’une de ses sorties, il a joué la carte de la transparence. «J'ai personnellement tenu à partager ces aspects de ma vie, afin de permettre à toutes et à tous, d'avoir un millième de vérité sur ma vie. Question de jouer la transparence à fond.»