30 novembre 1989 - 30 novembre 2017, cela fait 28 ans déjà que le tout premier président du Cameroun indépendant est décédé et inhumé au cimetière de Woff dans la capitale sénégalaise, alors que la question du rapatriement de ses restes reste toujours au cœur du débat public.
C’est un anniversaire qui ne passe pas inaperçu pour les pros Ahidjo qui restent nombreux dans le landerneau camerounais. Au petit matin du 30 novembre 1989, drue, la nouvelle est tombée, annonçant douloureusement le décès à Dakar au Sénégal, de celui qui avait dirigé le Cameroun entre 1960 et 1982.C’était aussi la fin tragique de 6 années passées en exil pour le premier président camerounais qui avait dû partir du pays en 1983, après avoir démissionné de ses fonctions le 4 novembre 1982.
Jugé et condamné par contumace à la suite d’un coup d’Etat manqué en 1983, Ahmadou AHIDJO dut fuir le pays pour se réfugier au Sénégal, où il vécut jusqu’à sa mort. Depuis lors, la question du rapatriement de sa sépulture plombe le débat public.
En 1991, à l’initiation du chef de l’Etat, une loi réhabilitant les martyrs camerounais est votée par l’Assemblée nationale, dont l’ancien président de la République, au milieu de plusieurs autres personnalités qui ont marqué l’histoire du pays.
A la suite de cette loi d’amnistie, quelques gestes d’ouverture seront pris par le pouvoir de Yaoundé pour réhabiliter la mémoire de l’ancien chef de l’Etat. Le stade Omnisports de Yaoundé est rebaptisé stade Ahmadou Ahidjo, alors qu’une avenue de Yaoundé porte le nom de son épouse Germaine. Dans la foulée de cette ouverture, son fils Badjika est nommé ambassadeur itinérant par le chef de l’Etat.
Dans la même veine, sa fille Germaine, revenu au pays en 2013, s’est reconvertie militante active du Rdpc au pouvoir, au point de soutenir la candidature victorieuse du président Biya à la dernière élection présidentielle dans la Bénoué. Elle vient d’être récompensée de son soutien envers le régime, à travers sa nomination au poste de président du Conseil d’administration du palais des congrès de Yaoundé.
Pension-retraite
Pour autant, toutes ces marques d’ouverture du pouvoir en faveur des Ahidjo ne semblent pas satisfaire tous les irréductibles de l’ancien président de la République. Et ce, en dépit de la volonté du chef de l’Etat qui, sur une radio étrangère, avait déclaré n’être pas opposé au rapatriement des restes de son prédécesseur, laissant l’initiative à la famille de l’illustre défunt.
Et pourtant, son épouse Germaine Ahidjo qui vit toujours au Sénégal, à la charge du gouvernement de Dakar, n’a de cesser de crier son amertume face à la situation «d’ingratitude » réservée à son époux, et notamment au sujet du retour au bercail de ses restes.
Déjà en 2002, le fameux mémorandum des ressortissants du grand nord incluaient dans ses revendications le rapatriement de la dépouille de l’ancien président de la république. L’association « Justice Plus », présidée par le frère aîné de l’actuel ministre des Finances, en a fait le cœur de son plaidoyer, multipliant des rencontres, tant officielles que privées, pour faire revenir au pays les restes de l’ancien président, sans succès. A ce sujet, un colloque prévu pour se tenir à Garoua du 7 au 8 février 2014 sur Ahmadou Ahidjo, avec la participation de nombreuses éminences grises à l’instar du cardinal Christian Tumi, avait été interdit par l’autorité administrative.
Mais les admirateurs de l’ancien chef de l’Etat n’entendent point désarmer. Dans un autre «mémorandum des enfants du grand Nord» qu’on dit en gestation, la question revient encore avec acuité, selon des indiscrétions qui filtrent de la préparation de ce document.
Et cette fois, les «Mémorandistes » envisageraient, en plus du rapatriement des restes de l’ancien président, d’exiger de l’Etat du Cameroun le paiement du cumul de sa pension retraite au profit de sa famille. Reste à savoir s’ils seront entendus ! En attendant, malgré la distance qui le sépare du pays qu’il a dirigé pendant 22 ans, le macchabée d’AHMADOU AHIDJO continue d’agiter la vie publique au Cameroun, 28 ans après son décès.