L’opinion n’a pas fortement relayé la nouvelle. Pourtant, le chef de l’État a bel et bien chassé son pilote, la semaine dernière. Certes, apprend-on, le président de la République n’a pas rendu publiques les raisons qui l’ont amené à se séparer de son pilote, mais tout pousse à croire que Paul Biya serait très remonté à la suite de l’acte posé par celui faisant partie du cercle censé assurer sa sécurité. Vrai ou faux ?
D’après les bruits de couloirs, ce pilote de la flotte présidentielle aurait voulu être plus royaliste que le roi en fuitant la composition du prochain gouvernement qui consacre la chute de plusieurs barons et l’entrée en scène d’une bonne brochette de jeunes, de nombreux parlementaires, et quelques magnats des milieux d’affaires.
À en croire cette pseudo mouture, le chef de l’État a également fait confiance aux femmes. Dans le même temps, une ouverture constante est observée en direction des partis de l’opposition dont l’Union des populations du Cameroun (Upc), l’Union démocratique camerounais (Udc) et des démissionnaires du Sdf (Social democratic front). On note pareillement le retour en force de certains anciens ministres qui ont fait leurs preuves par le passé au sein des maroquins importants.
Du coup, on comprend à travers cette affaire du pilote du président que, autant le feuilleton sur les fuites du prochain remaniement ministériel continue, autant la sécurité autour du chef de l’État reste discutable, au regard de l’origine parfois peu recommandable de personnages douteux qui entourent le président. Toujours est-il que Paul Biya garde encore la grande discrétion à ce sujet, même si les grands traits de la prochaine équipe ministérielle semblent se dessiner. Ce qui, évidemment, laisse cours à tout genre de spéculations dans les chaumières. Dans le même ordre d’idée, l’affaire du pilote du chef de l’État démontre bien que Paul Biya reste le seul maître du jeu dans l’arène politique, en renvoyant sine die la modification du gouvernement, qu’on dit désormais au plutôt, en décembre 2015.
Ambiance de panique
La principale leçon qu’on pourrait retenir de cette affaire, c’est sans doute que le chef des Armées a pris conscience que certains de ses collaborateurs insoupçonnés se sont constitués en véritables espions, épiant ses faits et gestes. On apprend par exemple que l’officier de l’armée de l’air au service de la plus haute autorité de l’État, était connu pour son sens du service et du dévouement dans les tâches à lui confiées.
Des sources à la présidence de la République confient que ce pilote avait réussi à conquérir la confiance presque totale de Paul Biya, jusqu’à ce grave accident. Aucune indélicatesse n’était jamais survenue dans le cadre de ses fonctions. Dans les couloirs du palais, il était présenté comme un homme adulé par diverses personnalités du régime qui voulaient faire parvenir soit un message, soit une correspondance stratégique et confidentielle au Prince.
L’histoire de ce pilote, toute proportion gardée, n’est pas sans rappeler celle de Luc Emane, du nom du lieutenant qui s’était rendu coupable du vol de la mallette du chef de l’État, au cours d’une escale à Genève, alors que Paul Biya se rendait à New York à l’occasion de la 63è session ordinaire de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations-unies (Onu).
Sauf que dans le cas de lieutenant Emane, le chef de l’État aurait finalement décidé de passer l’éponge sur l’affaire en étant clément envers l’ancien officier de la gendarmerie. Le fera-t-il également pour son pilote ? That’s the question.