Opinions of Wednesday, 20 July 2016

Auteur: Olivier Ndema Epo

Voirie urbaine: Yaoundé se ferme au modernisme

Une voirie urbaine Une voirie urbaine

Les réflexes des yaoundéens sont restés les mêmes d’une génération à l’autre. Pour se déplacer dans la cité ils ont gardé les mêmes repères. Point de changement d’habitudes ici. Les nouveaux noms de baptême choisis par la municipalité sont ignorés au quotidien, au profit des anciens.
Il est 6h45. Bertrand, habitant du quartier Messamendongo, se rend à son lieu de service. Il doit parcourir une quinzaine de kilomètres.

Chaque matin le jeune homme débourse 400 Cfa pour rallier la Maison de la Radio. Rodrigue et Landry ont leurs habitudes aux lieux dits carrefour des carreaux et Poste centrale. Comme ces jeunes gens, la totalité des habitants de la ville désigne ainsi ces trois sites. Les appellations Maison de la Radio, Carrefour des carreaux et Poste centrale ne sont en fait pas reconnues par la municipalité.

La Communauté urbaine de Yaoundé a pourtant opté dès 1994, pour une nouvelle politique d’adressage. Avenues, quartiers et rues ont pour la plupart changé d’appellation. Le comité d’adressage mis sur pied à l’occasion avait pour but d’embellir la cité, et d’en uniformiser l’aspect. Des plaques de métal bleues ont fait leur apparition sur des édifices publics et dans nombre de rues. Des numéros et codes sont ainsi attribués à plusieurs immeubles et domiciles. Les noms de baptême qui accompagnent ces numéros ont une connotation historico-culturelle. Certains tirent toutefois leurs origines de personnages sans rapport direct avec la mémoire camerounaise. Tel est le cas de Konrad Adenauer, ex Chancelier allemand.

Les populations continuent d’ignorer les nouvelles adresses, près d’un quart de siècle plus tard. Elles leur préfèrent les anciennes dénominations. La nouvelle Place Ahmadou Ahidjo continue d’être désignée par l’expression la Poste centrale. Le Carrefour des carreaux en revanche, n’est pas près de céder la place au Boulevard de l’OUA. De la même manière l’Avenue Konrad Adenauer remplacera difficilement la Maison de la Radio. D’autres noms de baptême restent ainsi boudés. Certains yaoundéens avancent pour expliquer cette attitude, le manque de visibilité des plaques signalétiques. Une frange non moins importante de la population parle de non accoutumance. De fait les anciennes dénominations existent depuis plusieurs décennies. Les plus conciliants des yaoundéens parlent de la nécessité de rééduquer les taximen.

Outre le rejet et la méconnaissance des dispositions communales, de nouveaux quartiers voient le jour. L’on peut citer les carrefours caca et beignets. L’activité économique et le quotidien des populations sont ici mis en avant. Des quartiers sont également baptisés en fonction du standing de ses habitants. Bien entendus ces noms de baptême ne sont pas reconnus officiellement. C’est ainsi que des destinations assez étranges sont proposées au quotidien telles : Cité de la paix ou Koweit City.

Ces nouveaux quartiers naissent spontanément. La politique d’adressage de Yaoundé n’est pas près de porter du fruit. Des séminaires et colloques se sont succédés dans le but de changer la donne. Le dernier en date regroupait des Maires de la Cemac en janvier 2016, dans la ville de Yaoundé. Selon des experts en Urbanisme, le commerce en ligne avec livraison à domicile, va difficilement se développer dans la capitale politique du Cameroun.