Opinions of Tuesday, 15 March 2022

Auteur: www.camerounweb.com

‘Ceux qui bloquent le traitement des enseignants viennent d’abattre leur avant-dernière carte’

Les enseignants ont prévu durcir le ton cette semaine Les enseignants ont prévu durcir le ton cette semaine

Lisez cette tribune de Valère Bessala sur la grève des enseignants, les mesures de Paul Biya pour les enseignants, etc.

A PROPOS DE LA PRÉCAUTION BUDGÉTAIRE SUR LES SALAIRES ET AUTRES ACCESSOIRES DE SOLDE DES ENSEIGNANTS : Ou l’expression de l’amateurisme complotiste de ceux qui nous gouvernent.

(Ne lisez pas…si vous n’aimez pas la lecture…mais ne vous plaignez plus d’être toujours à la traîne de ceux qui prennent la peine de lire )

Apprentis sorciers

Le Président de la République avait raison de les appeler « les apprentis sorciers » dans son discours du 27 février 2008, aux lendemains des émeutes dites de la faim. Les aînés au Gouvernement sont méchants, cyniques, inhumains. Ces adeptes de « l’inertie » ont poussé leur cynisme et leur méchanceté tellement loin, qu’ils se sont ligués pour instaurer une précaution budgétaire sur les salaires et les accessoires de traitement des personnels des Enseignements Secondaires et de l’Education de base.

C’est avec un certain effroi que, comme tous les Camerounais, je l’ai découvert dans la lettre de monsieur le Ministre d’Etat Secrétaire Général à la Présidence de la République, en date du 07 mars 2022, répercutant à Monsieur le Secrétaire Général des Services du Premier Ministre, les Très Hautes Directives du Président de la République autorisant la levée, par le Ministre des Finances, du »blocage de précaution budgétaire » sur le ministère de l’Education de Base et le ministère des Enseignements Secondaires. Ce fait semble être passé inaperçu au sein de l’opinion publique et même dans la communauté des enseignants. Et pourtant, c’est dans cette épistole que l’on pourrait trouver réponses à plusieurs questions que l’on se pose sur l’atmosphère de travail au sommet de l’Etat, ainsi que les intentions sournoises des uns et des autres en général, et sur la situation des Enseignants en particulier.

Qu’est-ce qu’une précaution budgétaire ?

Mais pour une bonne compréhension, il importe de s’attarder sur quelques préalables notionnels, notamment sur la signification de cette précaution budgétaire qui semble-t-il, serait la clé explicative de tous les malheurs des enseignants, avant que de se poser quelques questions rhétoriques dont les réponses s’imposent d’elles-mêmes.

Qu’est-ce qu’une précaution budgétaire?

Opérons quelques petites précisions notionnelles. Qu’est-ce qu’une précaution budgétaire ?

…une mesure prudentielle…

Une précaution budgétaire est une mesure prudentielle prise par l’autorité en charge du budget consistant à rendre indisponible une fraction des crédits ouverts par la Loi de Finances. Elle intervient dans la phase de l’exécution du budget, après adoption définitive de la Loi de Finances au Parlement, dans le but de constituer une réserve de précaution. Elle a une périodicité annuelle, probablement reconductible au cas où les motifs ayant concouru à son institution persistent. Dans la pratique budgétaire en France par exemple, elle n’excède généralement pas 1% des crédits ouverts à titre de dépenses de personnels et 3% en moyenne pour les autres dépenses.

…une mesure de sauvegarde et d’urgence…

Instituée pour constituer pour le Gouvernement, une enveloppe de crédits plus facilement mobilisable afin de lui permettre de faire face aux aléas susceptibles de survenir en cours de gestion, la précaution budgétaire est donc une mesure de sauvegarde et d’urgence.

Les objectifs incidents et corollaires de la précaution budgétaire…

Avant que de descendre dans l’analyse de l’application abjecte de cette technique budgétaire à ces deux chapitres de l’Education, il ne serait pas superflu de préciser que la mesure de précaution budgétaire, au-delà de la constitution d’une réserve de précaution qui vise à garder intacte la capacité de l’Etat à pourvoir aux dépenses pressantes, urgentes et inéluctables, a trois (3) autres objectifs incidents et corollaires :

Elle contribue à la « responsabilisation » des gestionnaires qui sont astreints à une obligation d’établir la programmation de leurs dépenses en gardant à l’esprit et en tenant compte de ce que les crédits mis en réserve, ne seront pas disponibles ;
Elle vise à susciter chez les ordonnateurs des chapitres faisant l’objet d’une précaution budgétaire, une capacité d »’auto assurance ministérielle » , au cas où la dépense tendrait à devenir plus dynamique en cours d’exécution du budget ou alors au cas où des mesures nouvelles seraient mises en œuvre au cours de l’année budgétaire ;
Et enfin, elle permet au Gouvernement de se donner une plus grande capacité de faire face aux besoins de solidarité interministérielle.
La responsabilité spécifique des ministres de l’Education…face à une précaution budgétaire…

Le plus important, lorsqu’une mesure de précaution budgétaire est prise, est que les responsables de programmes de chaque ministère concerné doivent se retrouver dans l’obligation d’établir une programmation budgétaire dérogatoire à la programmation initiale, afin de tenir compte de la réserve instituée et pesant sur leurs chapitres. Ils peuvent être à tout moment soulagés par le ministre en charge du budget qui peut en cours d’exercice, décider du « dégel partiel » ou non des crédits, programme par programme, afin de faire face par exemple, à des dépenses inéluctables.

Posons-nous les bonnes questions…
Posons-nous donc les questions essentielles, les questions qui comptent.

Qui a ordonné la mise sous précaution budgétaire des chapitres de l’Education de base et des Enseignements Secondaires ? Pourquoi le chapitre de l’Enseignement supérieur en a été exempté ? Est-ce parce que les enseignants du Supérieur sont moins nombreux ou parce que leur gestion est déjà passablement ordonnée ? Depuis quand ou combien de temps cette précaution est-elle exécutée sur ces deux (2) chapitres du budget ? Sachant qu’elle obéit au sacro-saint principe de l’annualité budgétaire, comment et par qui cette précaution a-t-elle été renouvelée d’année en année, au point où l’on peut constater un gel de plus ou moins dix ans des crédits liés aux dépenses des personnels enseignants ? Pourquoi seulement avoir choisi ces deux (2) chapitres alors même que d’autres ministères existent et gèrent au quotidien et ce de manière fluide et sans entrave, la solde de leurs personnels ?

Poursuivons le questionnement.

A admettre même par extraordinaire que cette précaution budgétaire n’est pas le fait d’une conspiration contre l’institution Suprême du Cameroun, … qu’est ce qui justifie que le ministre de l’Education de Base et celle des Enseignements Secondaires n’aient pas conçu et élaboré respectivement des programmations dérogatoires à celle initiale, afin de parer au contre coup de cette précaution ? Il se serait agi à titre d’exemple, de programmer chaque année, et par à coup, la liquidation de ces dépenses de personnels de leurs secteurs, par ordre de priorité et de demande. Comment expliquer que pendant cette période de gel, des liquidations de dépense de personnels enseignants aient été pourtant opérées au faciès, à coups de corruption et par voie de réseaux ? D’où venait cet argent? Dans quels programmes le prenait-on?

De l’incompétence et de l’égoïsme des ministres de l’Education…

Pourquoi n’avoir pas fixé une quotité annuelle des crédits liés aux dépenses de personnels et exposables à la précaution budgétaire ? Cela aurait permis d’établir un ratio de liquidation annuel de ces dépenses. Fort de ce que ces deux (2) chapitres de l’Education figurent parmi les budgets les plus importants de la Loi de Finances, est-ce donc à dire que les chefs de ces départements ne se seraient contentés égoïstement que de leurs dépenses de lux et de villégiature dans le pays au détriment de la survie même de ceux qui fondent l’existence et la raison d’être de leurs portefeuilles ministériels?

« D’où vient-il que l’on ait procédé au gel total des dépenses liées aux personnels enseignants sans possibilité de desserrement ? »

Même les guerres ne peuvent justifier cette ignominie…

Partant du fait que la réserve budgétaire est constituée lorsque l’Etat encourt une situation de cessation de paiement, ou pour être moins alarmiste, un risque de ne pouvoir pas honorer ses obligations régaliennes ou le service de sa dette surtout extérieure, … pourquoi avoir continué à recruter massivement et à tout va, si l’Etat se sentait déjà dans l’incapacité prochaine de garantir le pain quotidien aux agents déjà en situation d’emploi ?

Sachant pertinemment que les dépenses de guerre (Boko Haram et les sollicitations sécuritaires dans les deux (2) régions saxonnes du pays) sont faiblement supportées par les impôts, d’où vient-il que l’on ait procédé au gel total des dépenses liées aux personnels enseignants sans possibilité de desserrement ? Puisque la dette de l’Etat aux Enseignants remonte à près de dix (10) ans.

Et même si c’est le Président de la République lui-même qui l’avait autorisée…

Si tant serait que la prise de cette mesure aurait reçu l’aval du Président de la République, pourquoi ne lui avoir pas fait voir toutes les facettes et conséquences (notamment sociales) à moyen et long terme sur ces personnels et sur le pays?

Tous coupables…

Des questions et des questions dont les réponses ne dédouanent pas ceux qui nous dirigent. Tout porte à croire que le Président de la République a encore été trompé. Mais à quelles fins? La conspiration a savamment fait son nid. Et les conspirateurs ont déjà commencé à se mordre la queue. Puisque le Chef de l’Etat est resté muet et imperturbable, malgré les remous, malgré les marches et sorties des élèves dans les rues qui ont jusqu’ici mobilisé plus que certains partis politiques dans leur bouillonnement burlesque.

Après le test…l’action…
L’on comprend donc que la mesure inopportune qui avait été prise pendant la Coupe d’Afrique des Nations, de ramener le temps de l’Ecole à 13 heures, n’était qu’un t’est que les conspirateurs faisaient dans le but de commencer à échauffer les leviers de ce GRAND DÉSORDRE qu’ils allaient organiser dans le milieu de l’Education… mieux encore à travers les deux(2) principaux ministères qui non seulement portent le plus de personnels, mais surtout dont l’impact des dysfonctionnements est le plus à même provoquer une onde de choc suffisamment électrocutive, dans toutes les strates de la vie sociale et de la société.

L’avant dernière carte du complot…

Ma conviction profonde est que la précaution budgétaire sur les salaires et traitement des accessoires de solde des Enseignants, est l’avant dernière carte que les conspirateurs ont abattue. La dernière carte, ils la tiennent encore entre leurs mains…mais…mais…mais apparemment le Président de la République la connaitrait déjà… peut-être qu’une fin de mois sonnera bientôt et qu’aucun agent de l’Etat ne verra son salaire viré… peut-être qu’un matin une voix autre que notre très Illustre et Grand Berger, nous parlera de lui à la Bourguiba… peut-être… peut-être…qui sait?

Il aime agir sur le tard. Il est un adepte de la stratégie du pourrissement…attendre…. attendre…juste le temps d’être totalement certain de ce qu’il sait déjà…et puis… FRAPPER !!!

OTS/TCT
Bravo…si vous avez lu…le SurHomme ne le devient qu’à travers ses lectures et les douleurs de ses expériences.

Valère Bertrand Bessala