Infos Santé of Sunday, 11 September 2016

Source: camer.be

Cameroun: moins de naissance d'enfants séropositifs

Photo d'archives utilisée à titre d'illustration Photo d'archives utilisée à titre d'illustration

Depuis plus de deux ans, « aucun enfant porteur du VIH n’est né dans cet hôpital », affirme Henriette Toto, infirmière major de l’hôpital de district d’Efoulan, un quartier de Yaoundé, la capitale du Cameroun. « On a obtenu ce résultat grâce à l’action combinée des groupes de soutien et du personnel médical », ajoute Toto qui est la responsable des consultations prénatales dans cet hôpital.

Gertrude Endzimbi est en consultation prénatale. Elle attend son deuxième enfant. Le premier est né en 2013 et il est séronégatif, pourtant Endzimbi est une mère porteuse du virus du Sida. « Mon mari et moi sommes porteurs du virus. Lorsque j’ai su que j’étais enceinte, j’ai voulu pratiquer un avortement pour ne pas mettre au monde un enfant malade. C’est une amie, membre d’un groupe d’un soutien qui m’a expliqué que désormais, une femme séropositive peut accoucher d’un enfant sain », explique Endzimbi.

Cette jeune mère au foyer de 32 ans a en effet reçu des conseils de l’association 'No Limit for Woman Project' (NOLFOWOP), un groupe de soutien aux femmes séropositives, basé à Yaoundé. L’association, dont les membres viennent en appui deux fois par semaine au personnel de santé de l?hôpital d?Efoulan, existe depuis 2000 et reçoit l’appui matériel et financier du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) depuis 2009, dans le cadre du Programme enfant VIH et SIDA. «J’ai pris un traitement médical pour que mon enfant ne contracte pas le VIH. Durant toute ma première grossesse, mon mari était très inquiet. Il n’a été rassuré qu’après que le test de dépistage du VIH de l’enfant s’est révélé négatif. C’est d’ailleurs pourquoi il a accepté que nous fassions un deuxième enfant», dit Endzimbi en souriant.

Selon des statistiques publiées par le bureau de l’UNICEF au Cameroun, 20 pour cent des cas de transmission du VIH de la mère à l’enfant se font pendant la grossesse, 65 pour cent au moment de l’accouchement et 15 pour cent pendant la période de l’allaitement. Le rapport 2015 du Comité national de lutte contre le Sida lui, indique que le taux de prévalence du VIH chez les femmes enceintes est de 7,8%. « Ce taux varie de 7,4% en milieu rural à 8,1 % en zone urbaine », révèle ledit rapport. Le Comité national de lutte contre le Sida est un programme multisectoriel de lutte contre le VIH/SIDA. Comme Gertrude Endzimbi, toutes les femmes séropositives doivent suivre un programme de «Prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant» (PTME), gratuitement offert dans les unités de soins maternels et infantiles des hôpitaux publics camerounais.

La PTME comprend «la sensibilisation, le dépistage volontaire et confidentiel du VIH, le dépistage et le traitement des infections sexuellement transmissibles, la pratique de l’accouchement à moindre risque. On administre également des antirétroviraux aux femmes et enfants séropositifs. On leur donne des conseils en alimentation et leur apporte un appui psychosocial», explique Henriette Toto, l’infirmière major de l?hôpital d?Efoulan. «Il faut dire que de nos jours, nous sommes déjà à l’option B+, qui est une nouvelle thérapie. L’option B+ est une Trithérapie mais en dose unique qui a l’avantage d’être moins contraignant pour le malade. De plus, les recherches ont démontré que le B+

diminue considérablement le risque de contamination de la mère à l’enfant », ajoute Toto. Selon le Comité national de lutte contre le SIDA, seulement 81 pour cent des femmes qui vont en consultations prénatales acceptent de faire un test de dépistage du VIH. Le ministère de la santé publique a dû prendre des dispositions pour que les femmes, qui ne veulent pas faire ce test, ne mettent plus au monde des enfants infectés. On propose systématiquement de faire le test de dépistage à toutes les femmes qui vont en consultation. De plus, «nous avons reçu des instructions fermes. En salle d’accouchement, nous dépistons systématiquement toutes les femmes dont le statut sérologique n’est pas connu et leur administrons immédiatement la PTME si nécessaire», révèle Dr Fouda, médecin à Yaoundé.

La large diffusion de la PTME rencontre cependant quelques obstacles dus au fait que toutes les femmes enceintes ne vont pas en consultations prénatales et beaucoup accouchent dans des cliniques privées ou dans de petits centres de santé des zones défavorisées. Selon les chiffres de l’UNICEF qui datent de 2012, près de 995.533 femmes étaient attendues en consultation prénatale en 2011. Seulement 363.673 femmes, soit 36,56 pour cent, y sont allées. Dans ces cas de non-fréquentation des centres médicaux, l’action des groupes de soutien communautaires est également salutaire. «Nous essayons de toucher le plus grand nombre de femmes en prenant part aux réunions des associations féminines. Nous orientons ces femmes vers les hôpitaux publics et gardons le contact avec elles à travers des visites à domicile», explique Odette Etamè, la présidente de l’association NOLFOWOP.

Ces groupes de soutien n’existent que dans quelques hôpitaux du Cameroun. Le modèle de l?hôpital d?Efoulan « pourrait être vulgarisé dans tout le pays », explique Odette Etamè qui ajoute qu’elle est à la recherche de financements pour créer d’autres groupes de ce genre. "Il est prévu la création d'au moins un groupe de soutien dans chacun des 179 districts de santé que compte le Cameroun. Le processus est en cours dans quelques districts de santé, mais ce n'est pas encore effectif partout", dit-t-elle.

Pour son fonctionnement, l’association NOLFOWOP d’Odette Etamè reçoit des aides de plusieurs institutions dont le ministère de la Santé publique, Care International, et l'UNICEF qui apporte un appui financier pour couvrir, par exemple, les frais de taxi lors des visites à domicile.