Les chiffres sont inquiétants. Entre le 02 octobre et le 02 novembre 2017 dans deux des trois arrondissements du chef-lieu de la région de l’Est, près de 30 mille camerounais non identifiés ont été recensés. « A Mandjou, nous avons recensé 23.610 personnes qui ne disposaient pas d’actes de naissance, de cartes nationale d’identité, encore moins des cartes d’électeurs et 5220 dans l’arrondissement de Bertoua 1er, pour un total de 28.830 personnes dépourvues de toutes pièces officielles », explique Abraham Hopefulson Tchaobe, président de l’Association pour la défense des droits de l’homme et des libertés (Asdeprod) basée à Bertoua. Il s’agit pour la plupart, des enfants non scolarisés, des jeunes adolescents désœuvrés et des personnes âgées vivants dans des quartiers enclavés et qui en majorité ne possédaient pas d’actes de naissance, pièce indispensable pour l’établissement de la carte nationale d’identité.
Selon cette organisation, cette situation s’explique d’une manière générale, par le faible taux de déclaration des naissances, et la méconnaissance par les parents et les communautés surtout rurales de l’importance de l’état civil dans la vie d’un individu et donc de l’intérêt de l’enregistrement des naissances. Dans certaines communautés de cette région, plusieurs parents ne donnent pas la priorité à cette formalité, étant donné qu’ils doivent faire face à d’autres défis quotidiens. La plupart se contentent généralement des fiches de naissances délivrées par les maternités et se rendent compte de leur caducité longtemps après. En revanche, ceux qui sont informés, ont peur des amendes encourues une fois passé le délai de déclaration de naissance. Et cela, sans compter l’éloignement et le manque de moyens des services d’état civil.
Cette enquête menée à titre d’échantillonnage, permettra à cette association de plaider auprès des pouvoirs publics et d’autres partenaires, pour faciliter l’établissement des pièces officielles à ces populations vulnérables. Pour le président de l’Asdeprod, la problématique de l’état civil dans la région de l’Est est un drame sur lequel il urge que les pouvoirs publics se penchent sérieusement. « L’acte de naissance est un document qui rend à l’enfant son identité, préserve ses droits et son avenir. C’est la preuve légale unique de son existence, de sa filiation biologique, de son identité et de sa nationalité », affirme, ce spécialiste des droits de l’homme. Du point de vue statistique, dit-il, un pays qui n’est pas à mesure de connaitre le nombre de ses habitants aura toutes ses données macroéconomiques faussées et par conséquent, il sera débordé par des problèmes sociaux.