Actualités Régionales of Sunday, 17 July 2016

Source: info-cameroun.com

Mbalmayo: Un don de Biya divise les Bamouns musulmans

L’enveloppe de paul Biya L’enveloppe de paul Biya

Un semblant de calme est revenu dans la communauté Bamoun après la célébration de la fin du jeune du ramadan qui a failli être perturbée par une affaire de mauvais partage d’une somme d’argent envoyée par le Président de la République.

Même si elle a encaissé 500.000 fcfa pour préparer la fête, une partie de la communauté musulmane Bamoun ménace toujours de saisir les tribunaux à la suite de la vive dispute autour du don présidentiel aux musulmans de la ville de Mbalmayo.

Le calme habituel observé dans la ville à l’approche de chaque fin du jeune du Ramadan a été brisé le 02 juillet 2016. A cette date, l’imam de la mosquée centrale, Oumarou Babba Ousmanou, reçoit la visite de deux individus venus de Yaoundé pour remettre une enveloppe contenant la somme d’un million de f cfa envoyée par le Président Biya.

Après avoir identifié les visiteurs comme étant des émissaires de la Présidence de la République, l’imam se saisit de l’enveloppe sur laquelle on pouvait lire «mosquée Bamoun de Mbalmayo». Par la suite, Oumarou Babba Ousmanou dit avoir immédiatement appelé le chef de la communauté Bamoun, lui demandant au passage de venir avec «ses» deux imams.

Cette précision s’explique par le fait que depuis un moment un groupe de musulmans Bamouns – mécontents – qui adorait Allah au départ dans la mosquée dite du Centre s’est détaché pour aller créer une autre mosquée à quelques encablures.

Accompagné des imams des deux mosquées, Aliyou, le chef de la communauté Bamoun se rend chez Oumarou Babba Ousmanou et en présence des émissaires de la Présidence, explique que cet argent qui est bien destiné à la mosquée du Centre sera divisé en deux parts égales pour que les dissidents en profitent également.

Poutougnigni Moustapha, imam de la mosquée du centre, qui a apposé sa signature sur le document de la Présidence refuse de prendre 500.000 fcfa alors dit-il qu’il a émargé un million.

Sur ces entrefaites, les émissaires de la Présidence repartent alors que le chef Bamoun qui detient l’enveloppe continue à convaincre l’imam de la mosquée du centre de prendre la moitié de l’argent. Pendant ce temps, Yap Zakariaou, imam de la mosquée No 2 du Centre –nouvellement créée- empoche sans hésitation 500.000 fcfa.

Poutougnigni avait des raisons de protester d’autant plus que depuis dix-sept ans, c’est la mosquée du Centre qui reçoit la totalité du don présidentiel avant de décaisser une partie du montant au profit de la mosquée dirigée par l’imam Yap Zakariaou et d’autres groupes de musulmans.

Rencontré par Info-Cameroun, le Chef Aliyou a dit qu’il avait déjà planifié que cet argent sera partagé. Pour ce faire, il a au cours de l’année saisi le préfet du département du Nyong et Soo et le commissaire spécial de la ville pour faire connaitre ses intentions.

C’est lui qui a retenu la somme d’argent rejetée au préalable par Poutougnigni, l’imam de la mosquée du Centre, qui a finalement pris l’enveloppe entre les mains cette fois des autorités administratives de la ville. «Nous avons pris 500.000 f cfa mais l’affaire n’est pas close », a indiqué à info-Cameroun un membre du bureau de la mosquée du Centre.

Pour comprendre la querelle nourrie au sein de la communauté Bamoun de Mbalmayo, il faut remonter jusqu’à Njinjiemoun Ibrahim. Cet ancien inspecteur des impôts, par ailleurs prince, s’est acheté un lopin de terre dans la ville sur lequel il a bâti son domicile et une modeste mosquée.

«Il a fait cela parce qu’à l’époque, les musulmans faisaient la prière sur de vieux sacs et cartons à la place du marché. Il a été touché et a décidé de leur faire don d’une mosquée», indique Veuve Njinjiemoun rencontrée par Info-Cameroun.

Quelques années plus tard, l’inspecteur des impôts, devenu entretemps chef de la communauté Bamoun, décède. Le premier adjoint de la mosquée, Aliyou, devient chef en juillet 2015. De son vivant, «c’est le chef qui décidait du don présidentiel avec sa famille », dit Aliyou qui ajoute : «je n’avais jamais vu cet argent ni même l’enveloppe contenant cet argent».

Aliyou, qui s’est joint au groupe de dissidents partis plutôt pour créer une autre mosquée, a juré depuis lors de tout faire pour que le don présidentiel soit partagé en deux parts égales contre le gré de veuve Njinjiemoun, Poutougnigni et d’autres fidèles de la mosquée du centre.

Il use pour cela de ses relations dans le cercle administratif de la ville et dit avoir souhaité que la famille Njinjiemoun fasse un morcellement dans leur titre foncier afin que la mosquée du Centre –que la famille du défunt présente comme un don- soit effectivement cédée aux musulmans. «Je vois à la télé qu’on remet le don avec les clés », ironise-t-il.

«Même s’il faut morceler, ce sera au nom de qui », se demande veuve Njinjiemoun. «On ne peut s’empêcher d’avoir un droit de regard sur cette mosquée mais elle reste un don que mon époux a fait à Dieu».

La seconde mosquée contrairement à la mosquée du Centre n’a pas une autorisation administrative. Ses partisans misent sur le don présidentiel pour prospérer et surtout mettre en difficulté la mosquée du Centre. «Les mosquées n’ont pas besoin d’autorisation. Cette mosquée a reçu un acte royal du sultan», dit Yap Zakariaou qui ne cache pas le soutien du chef de la communauté Bamoun à cette mosquée.

Mère de huit enfants, veuve Njinjiemoun indique que le don présidentiel est très important pour la mosquée du Centre. Ce don, dit-elle, permet d’acheter à manger et à boire aux fidèles et aux autorités, d’acheter le nécessaire pour le fonctionnement de la mosquée et surtout une partie de ce argent sert d’argent de poche au jeune imam Poutougnigni.

«Aliyou a dit qu’il va détruire la mosquée du Centre. Pour défendre cette mosquée, on ira jusqu’au bout», déclare veuve Njinjiemoun, furieuse.