Un enseignant et homme politique fait une analyse bien nourrie des 40 ans de règne de Paul Biya. Camerounweb a reçu copie de cette analyse dont voici l'extrait.
« Monsieur, Paul Biya, en accédant au pouvoir en 1982, avait axé sa vision du monde et son action politique sur 5 piliers fondateurs du
Il s’agit de :
1-la rigueur et la moralisation,
2- la démocratisation,
3- la libéralisation de l économie,
4- la justice sociale,
5- la diplomatie de rayonnement et de non alignement et la souveraineté nationale.
Qu’en est -il réellement 40 ans plus tard ?
Pour établir un bilan d’un si long règne du Président de la République du Cameroun, SE Paul BIYA, il faut revisiter froidement l’issue finale des 5 piliers de sa vision de 1982 au plan politique, économique, social et diplomatique…
Certains vont être tentés de dresser une analyse comparée du niveau des progrès réalisés depuis 40 ans entre son régime et celui de son prédécesseur.
En réalité seuls des bonimenteurs d un diagnostic messianique, seront plus à l aise avec un tel exercice d esbroufe. il ne s agit pas de nous compter des routes aménagées, des lycées créés en abondance, des barrages non livrés, des ports en eaux profondes, des stades de luxe de football de type prestigieux, des universités éclatées dans les régions etc…
Cette approche occulte l’échec de la vision précitée. Elle pose un vernis frelaté sur la kleptomanie métastasique et le chaos social et politique de ces 40 dernières années de pouvoir au Cameroun.
Il ne sera donc pas surprenant d entendre un oraison de victoire d’un griotisme coupable…
Mon analyse n est pas un nihilisme qui récuserait quelques progrès téléphoniques, de la liberté de la presse, de la cargaison des partis politiques nés et à naître, d’un millier de kilomètres de bitume réalisés ou des aménagements de ports… Les réformes institutionnelles et structurelles ont été opérées elles aussi depuis 1982. Nous avons des Conseils régionaux a l’image de la décentralisation de celle inscrite dans la Constitution en 1996…. Le niveau des infrastructures aménagées dans la même période dans le pays, comparativement à ce qu'était la situation infrastructurelle et structurelle d’avant 1982 a été largement amélioré…
Il ne s’agit pourtant pas de comparer deux régimes successifs ni deux époques…
Il s agit de dresser le bilan des 5 piliers de la vision originelle de Paul BIYA son visionnaire et d’évaluer sa performance propre à son régime de 40 ans et leurs moyens…
Le Chef d État le plus médiocre n’aurait pas réalisé moins que ce qui a été fait
au Cameroun ces 40 ans derniers.
Au plan politique donc, les 40 ans de pouvoir du président, Paul BIYA, ont largement desservi sa propre contemplation de la République et de la démocratie. On a contemplé pernicieux en lieu et place de la démocratie promise, une ploutocratie épileptique et une monarchisation de la République.
Il disait pourtant et à raison que, le Cameroun n est ni une oligarchie ni une monarchie. Les pancartes à la gloire de son fils pour sa succession, peu importe qui se fond derrière elles, sont un ‘indicateur d’échec de cette contemplation démocratique que substitue celle monarchique.
Dans un ocean de changements politiques alternatifs ailleurs dans le monde, un pouvoir de 40 ans, en 2022, est tout sauf une démocratie.
Il faut souligner que le Président Paul Biya que je respecte, est arrivé au pouvoir par un mécanisme Constitutionnel d’une succession neutre ne pouvant souffrir d’aucun soupçon de népotisme ou de filiation génétique sous un régime auquel personne ne prêtait un centime de démocratie…
Le bilan de la contemplation de la démocratie par M. Paul BIYA, chef de l’Etat, est un échec. Car la démocratie ne reproduit pas le règne d’un même homme au pouvoir pendant 40 ans.
Au plan économique, la libéralisation fut un des piliers de sa vision. Son implémentation est un échec. Elle accouché d’une braderie sauvage des outils de production du patrimoine national sans aucune perspective de substitution autre que la quasi domination des pans entiers du marché national par des multinationales et des capitaux étrangers…
Le Cameroun a perdu le contrôle de son embryon industriel de base des années 1970-1986, depuis notre admission aux divers plans d ajustements structurels du FMI… Notre marché local reste durablement dépendant de l’industrie étrangère en phagocytant les moyens de création des emplois internes par un ressort entrepreneurial endogène affaissé …
Le parc des sociétés publiques et parapubliques de production interne tenu par la SNI, est passé aux mains de capitaux étrangers à 80% ces 40 dernières années en faisant disparaître plusieurs d’entre elles et en aggravant la dépendance de la consommation locale à la production exogène…
Avec l’ONCPB, le Cameroon avait atteint une production annuelle de 600.000 tonnes de cacao, venant juste derrière la Côte d’Ivoire, premier pays producteur de ces sèves au monde… Aujourd’hui, 40 ans plus tard, le Cameroun produit a peine 100.000 tonnes de cacao…
Analysons la rigueur et la moralisation, le tout premier pilier de la même vision. Elle est confrontée encore aujourd’hui à des vents contraires des membres de
l’exécutif nommés par son idéologue en chef, le Président Paul Biya, avec des indicateurs d’une société exsangue et pâle en déliquescence morale… Les prisons sont pleines de hauts cadres étatiques et de grands commis de l État, plutôt délinquants et criminels à col blanc membres du RDPC et membres du gouvernement…
Ils sont incarcérés en grand nombre ou encore pour d autres parmi eux en état des poursuites judiciaires. Leur nombre reste toujours croissant, et ceci, au niveau le plus élevé de la République.
Contraints à rendre gorge même les plus zélés rasent les murs de la reddition des comptes face à un champion en isolement politique pernicieux de succession…
Les fonctionnaires sont devenus des multimilliardaires bien plus que les hommes d affaires en 40 ans…
Malgré une répression tardive, les suites répressives de la rigueur et de la moralisation arrivées sur le tard, apparaissent désormais sans doute faussement, comme un mécanisme d épuration politique… C’est donc aussi un constat d’échec flagrant aggravé. La gestion des fonds COVID-19, a exposé la décrépitude des mœurs publiques autant que de la gestion des lignes 65 et 94 sous enquêtes en cours… on parle déjà de 5000 milliards de CFA en fumée aux mains de crapules… Il en sera de même de la gestion des constructions des complexes sportifs de Japoma et Olembe qui n’est pas épargnée…
La justice sociale est un autre pilier du même concept. Elle aura été la chose la moins partagée ces 40 dernières années. C'est sa carence qui est à l’origine des crises qui portent atteinte à l’Unité du pays et provoque des déchirements entre les ethnies…
Les iniquités de progrès des régions et celles de la redistribution de la richesse nationale ont engendré des replis identitaires aggravés, marqués par des frustrations diverses de clans et du risque d’élargissement des espaces déjà en guerre….
Le constat le plus catastrophique que l’on dresse hélas de l’échec du > porte surtout les marques des drames condamnables certes de la guerre fratricide du NOSO et les tentatives de l’abominable sédition du pays par des extrémistes séparatistes avec au bout du compte des milliers de morts en 5 ans en raison aussi de l’épanouissement et la contemplation par des actes de l’injustice sociale d un système exténué de 40 ans…
La trame de la même misère sociale et d’un enclavement économique semblable reste aussi observable dans la région de l’extrême nord où s’est incrustée la secte obscurantiste Boko Haram… L’Est du pays et voire le sud natal du Président de la République, présentent eux aussi des visages des retards de progrès chroniques…
L’ insertion sociale des jeunes dans le circuit de production après des études universitaires et autres enseignements, reste un des échecs les plus plausibles de la justice sociale qui pourrait devenir incontrôlable… Le pic du taux de chômage au Cameroun est l’un des plus alarmants en Afrique avec près de 4 millions de jeunes diplômés pour la plupart à 50 ans d âge sans emploi et n ayant connu que ce seul président de la République et sans perspective d’emplois…Les seules perspectives qui font recette et font rêver cette jeunesse sont désormais la distraction dans la distraction du football ou le risque de leurs vies dans les barques dans l’océan Atlantique à destination de l’occident …
L'État investit pourtant des sommes énormes pour élargir la base éducative au plus près des populations et pour former des jeunes…
Les lycées et les Universités du > partout dans nos régions depuis 1982, bien que ce soit factuel et nécessaire, sont donc en réalité des industries de production de chômeurs chroniques à vie depuis 40 ans… Même en recrutant 100.000 jeunes il en restera sur le carreau 3900.000 autres…
Cette injustice sociale constitue le principal foyer du chaos qui menace la paix nationale post-BIYA.
Au plan diplomatique chacun peut constater l’état des lieux d un pays reclus sur lui-même avec notre président affaibli par l’âge et qui se déplace de moins en moins à des sommets où la représentation par procuration des personnalités de second plan ne fait pas recette…
Ne parlons pas de la distribution de l'eau et de l électricité au Cameroun ces 40 dernières années et depuis 60 ans après l’indépendance qui constitue une honte et parfois une très humiliante pour les familles….
Il est inutile de m’attarder sur le rayonnement diplomatique du Cameroun.
l’ économie de ce qui précède débouche fatalement sur un bilan des performances d’ échec de l implémentation des 5 piliers fondateurs de l idéologie du président Paul BIYA depuis ces 40 derniers années au regard des ressources financières déployées pour le résultat produit.
Ce qui est le plus à redouter serait l’échec de sa sortie du pouvoir qui présente des signaux cancérigènes et systémique se profilant déjà à l’horizon.
Pr. Pierre Mila Assoute
President du RDMC. »