La Coacic demande la libération sans condition des personnes arrêtées et le rétablissement de l’internet. C’est l’essentielle d’une déclaration faite ce mercredi à Douala, la capitale économique du Cameroun, par les membres du Bureau exécutif de cette plateforme. Dans la déclaration suivante, le coordonnateur de la Coacic, fait des propositions au gouvernement de Yaoundé pour une sortie rapide de la crise dans la partie anglophone du Cameroun.
A L’ATTENTION DE MONSIEUR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
DECLARATION DE LA COALITION CITOYENNE POUR LE CAMEROUN (COACIC)
AU SUJET DE LA GRAVE CRISE SOCIO POLITIQUE QUE TRAVERSE LE PAYS.
Réunie en session extraordinaire en date du 15 Février 2017 en vue de mener une réflexion citoyenne et responsable sur la situation dramatique que vivent les populations du Sud et Nord-Ouest du Cameroun et proposer des solutions susceptibles de sortir notre pays du marasme politique dans lequel il s’embourbe un peu plus chaque jour,
La COACIC a produit la déclaration suivante.
• Considérant la crise sociopolitique que traverse notre cher et beau pays, le Cameroun, depuis le mois de novembre 2016 ;
• Considérant que cette crise, consécutive à des revendications catégorielles portées par des Organisations syndicales d’avocats et d’enseignants des régions du Nord et Sud-Ouest,
• Considérant que les réponses apportées à ces revendications par les pouvoirs publics -notamment l’arrestation des leaders – n’ont contribué qu’à la radicalisation des revendications ;
• Considérant que ces revendications au départ à caractère syndicales, se sont rapidement muées en revendications politiques notamment sur la forme de l’Etat ;
• Considérant qu’à ce jour, nos frères des régions suscitées réclament, pour les modérés le retour au fédéralisme et que certains autres plus extrémistes demandent ni plus ni moins la sécession ;
• Considérant que cette situation inquiétante cause d’énormes préjudices aux populations, notamment aux écoliers, élèves et étudiants qui ne vont plus à l’école
• Considérant que la suspension de l’internet cause un énorme préjudice aux affaires, renforce le sentiment de marginalisation de ces deux régions à travers la rupture communicationnelle avec les régions d’expression française ;
• Considérant que le risque jusque-là potentiel d’une confrontation intercommunautaire est de plus en plus palpable à partir du moment où des Camerounais soi-disant natifs de ces deux régions commencent à demander aux Camerounais prétendument « allogènes » ou simplement francophones de « rentrer chez eux » comme s’ils étaient étrangers au Cameroun ;
• constatant pour déplorer que l’arrogance des premiers émissaires du Gouvernement a contribué à l’escalade et à la radicalisation ;
• Constatant leurs tentatives de tourner en dérision des revendications légitimes et socioprofessionnelles des avocats et enseignants, par leur simplification et leur banalisation, prétendant que chaque région du Cameroun avait des problèmes similaires ce qui est vrai, sans préjudice du droit de chaque région d’exprimer les siens;
• constatant que cette fragilisation des syndicats a offert un lit douillet à des revendications politiques latentes, qui se déclinent désormais en retour au fédéralisme par les uns et sécession par d’autres ;
La COACIC,
Conformément à un certain nombre d’instruments qui fondent notre République, à savoir :
* la Constitution du Cameroun,
* la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples,
* la Charte africaine pour la démocratie, les élections et la gouvernance,
* le Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
* le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
* la Déclaration Universelle des droits de l’Homme, etc.
Constatant :
• qu’une menace réelle pèse désormais sur notre vivre ensemble ;
• qu’au fil des jours, le conflit s’enlise et, comme une maladie mal traitée, crée des résistances ;
• que cette situation crée des conditions d’une adhésion massive aux thèses séparatistes et indépendantistes
Recommande :
A très court terme,
• En vue de décrisper l’atmosphère politique délétère actuelle, la libération sans condition des personnes arrêtées et le rétablissement de l’internet ;
• La démilitarisation des deux régions concernées ;
• la publication des résultats de l’enquête sur les violences faites aux étudiant(tes) de l’Université de Buea
• La réouverture du dialogue ;
• La levée du mot d’ordre des villes mortes
A moyen terme
• l’application intégrale de la Constitution, à savoir notamment :
• l’organisation d’élections régionales telles que prévues par les articles 55 et suivants de la Constitution ;
• la mise sur pied du Conseil Constitutionnel (articles 46 et suivants);
• la mise sur pied de la Haute Cour de Justice (article 53 de la Constitution)
L’application de l’article 66 de la constitution sur la déclaration des biens, ou plus précisément la mise en œuvre de sa loi d’application déjà promulguée.
En tout état de cause : (c’est-à-dire d’ici 2018),
1.- La COACIC rappelle aux uns et aux autres, que le Cameroun est né, en tant que entité territoriale nationale, non pas en 1960 ou en 1961, mais le 14 juillet 1884, et que nul n’a le droit de répéter le crime commis par la Grande-Bretagne qui, en biaisant le référendum de 1961, a permis au Nigéria d’amputer notre nation.
2.- Elle exhorte tous les citoyens, à faire preuve de vigilance car les marchands de canons rôdent autour de notre pays, tels des prédateurs.
3.- la COACIC en appelle en particulier aux journalistes, afin que dans leur délicate mission d’information et de formation, ils n’oublient jamais la noble obligation qu’ils ont, en tant qu’éclaireurs des acteurs sociopolitiques, défenseurs de tous les droits humains, et levier du progrès social commun,
• de se distancer de toute forme de violence verbale ou écrite (car c’est la parole qui conduit à la guerre et à la paix selon la manière de l’exprimer) ;
• d’éviter les prises de position éditoriales pouvant générer ou exaspérer la haine, ou décourager le désir de vivre ensemble de la majorité des populations nationales ;
• de donner au contraire de la visibilité aux gestes, réflexions et positions des protagonistes ou des observateurs, susceptibles de favoriser la compréhension réciproques entre les communautés, et le retour de la paix.
4.- La COACIC rappelle enfin à tous, mais surtout à nos gouvernants, au regard, à la fois des échéances politiques qui attendent le pays dans 20 mois, et de la situation économique difficile qui se profile, que le retour de la paix, ici et maintenant, est un impératif catégorique, d’une part pour affronter de manière participative la crise socioéconomique, et de l’autre, pour permettre qu’au moins 15 millions de votants s’inscrivent sur les listes électorales, pour pouvoir dans les urnes en 2018, donner plus de légitimité à la gouvernance de notre pays.
Fait à Douala le 15 février 2017
LE CORDONNATEUR DE LA COACIC: BRUNO DEFFO