La plateforme de la société civile s’est réunie à Douala, à l’effet de produire une déclaration qu’elle a nommée « Action Civile 237 », à travers ses piliers que sont l’accès à l’information, la liberté de la presse, la démocratisation de l’espace public et notamment l’amélioration du processus électoral. L’actualité au cours des neuf premiers mois de l’année 2022 au Cameroun laisse observer le rétrécissement de l’espace civique à travers la limitation de l’exercice des libertés publiques, est marquée par une série de faits : Le 17 février 2022, le sous-préfet de la Commune d’arrondissement de Douala 4ème, accompagné des forces de police et de gendarmerie, a interdit un séminaire de formation des militants du Social Democratic Front (Sdf) et du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) sur la communication politique organisé par la Fondation Friedrich Ebert Stiftung. Le motif principal avancé par le Sous-préfet est que cette activité n’avait fait objet d’aucune déclaration par les organisateurs, et donc n’a pas été autorisée.
L’ancien journaliste ex rédacteur-en chef, Cédric Noufele, de la télévision Equinoxe a été convoqué le 16 mars 2022 par le préfet du département du Wouri, puis suspendu par le Conseil national de la Communication (Cnc) pour une durée d’un mois pour trois (3) motifs : un manque d’encadrement des panelistes ayant entrainé la diffusion de propos à caractères conflictogènes le 27 février 2022 dans l’émission « Droit de Réponse » ; d’avoir donné la parole à Séverin Tchounkeu le 21 mars dernier (selon le Cnc, le patron d’Equinoxe a eu, durant cette émission spéciale, prononcé des propos offensants à l’endroit des institutions de la république) ; d’avoir diffusé le 17 mars 2022 une vidéo datant du 06 octobre 2020 en guise d’illustration des menaces d’un sous-préfet de la région de l’Ouest à l’encontre des enseignants.
Mécontentement
Il en est de même de Severin Tchounkeu, Directeur de Publication à Equinoxe TV, qui après avoir reçu une mise en garde adressée par le gouverneur de la région du Littoral, s’est vu notifié une suspension d’une période d’un mois également par le Cnc. Dans le même ordre de sanction, l’émission « Droit de Réponse » présenté par le journaliste Cédric Noufele a également été suspendue pour une durée d’un mois. Les populations du village Dikolo-Bali à Douala sont sorties dans la rue pour manifester leur mécontentement suite à l’expropriation de leurs terres, le 20 mai 2022. Cette manifestation a été interrompue par la police. Celle-ci a dispersé les manifestants en utilisant les jets d’eaux et les bombes lacrymogènes sur ces derniers. La manifestation du Collectif des aveugles et malvoyants indignés du Cameroun (Camic) a été interrompue par la police le 27 juin 2022, puis au moins vingt (20) de leurs membres ont été arrêtés et gardés à vue au commissariat n°1 de Yaoundé pendant une demi-journée.
D’autres ont été conduits hors de la ville de Yaoundé, dans le département de la Mefou-et-Afamba précisément dans la ville de Mfou. Le collectif avait organisé cette manifestation afin de présenter leurs revendications au Premier Ministre, suite à leur exclusion des concours et recrutements dans la fonction publique, malgré les preuves qu’ils ont la formation et les diplômes requis. Leur porte-parole a déclaré : « nous nous sommes retrouvés au rond-point Hilton, aux environs de six heures du matin. Nous étions munis de nos pancartes pour le sit-in, les policiers sont arrivés dans les pick-up et ont commencé à nous violenter. Ils nous ont embarqués avant de nous conduire de force au commissariat n°1 de la ville de Yaoundé… ».
Le Directeur de publication du journal « Germinal », Jean-Bosco Talla, a reçu du Sous-préfet de Yaoundé 1er le 29 juin 2022, une interdiction d’une réunion publique (La Grande Palabre) projetée pour le 30 Juin 2022, alors que le 28 Juin 2022, ce même Sous-préfet lui avait remis un récépissé de déclaration de ladite réunion publique. Les éléments de la Sécurité militaire (Semil) ont débarqué le 04 Septembre 2022 dans les locaux de Canal 2 International à Yaoundé, à la fin de l’émission de débat dominical « Canal Presse ». Ces derniers y ont fait irruption dans l’optique d’emmener l’un des intervenant sur le plateau, l’universitaire Dr Chuo Walters qui aurait fait des déclarations en lien avec la gestion de la crise dans les régions du Nord-ouest et Sud-ouest Cameroun. Ce qui n’aurait visiblement pas plu aux autorités militaires.
Heureusement ce jour, l’émission ne se déroulait pas dans le studio de Yaoundé, mais plutôt dans celui de Douala. Une situation qui vise à mettre sous pression les hommes et femmes de médias, mais également à les mettre en garde sur la qualité et le choix de leurs invités, surtout si ceux-ci peuvent avoir un discours visant à porter un regard critique sur la gouvernance politique au Cameroun.
Séquestration des militants
La démocratie au Cameroun n’est pas seulement marquée par les éléments cités plus haut, elle est aussi en proie à l’impossibilité de déploiement de plusieurs partis politiques de l’opposition. Cette impossibilité de déploiement se manifeste par des séquestrations des militants, les menaces et interdictions diverses. Le Sous-préfet de Bafoussam 1er, en réponse à la déclaration de manifestation publique projetée par le MRC (Mouvement pour la Renaissance du Cameroun) pour le 20 Août, a délivré le 17 Août 2022, un document aux responsables de ce parti, les invitant à organiser leur manifestation dans une salle ne pouvant pas contenir plus de 50 personnes en raison de la pandémie à Covid-19, a-t-il précisé.
Il faut préciser que cette manifestation consistait au renouvellement des organes de base de ce parti politique dans la région de l’Ouest Cameroun. On se souvient qu’il y a quelques mois de cela, le parti au pouvoir le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) se pliait au même exercice et aucune interdiction ne lui avait été délivrée, ni pour des raisons de propagation de la pandémie à Covid-19, ni pour autre raison que ce soit.
Le ministre de l’Administration territoriale a rendu public un communiqué radio le 02 Septembre 2022 dans lequel il somme le nommé Samuel Séverin Ango, Président du parti politique « La Nationale », de ne plus se présenter comme tel.
D’après le Minat, ses services n’ont pas reçu de correspondance venant du parti « La Nationale » et faisant de Samuel Séverin Ango, le président. Dans le même communiqué, il appelle l’opinion publique à plus de vigilance et à ne plus considérer ce dernier comme tel. Toute situation qui démontre de la volonté du Minat à s’immiscer dans la vie interne des partis politiques. Tels sont quelques morceaux choisis sur la situation dépeinte par la plateforme de la société civile, déclaration signée ce 15 septembre par Philippe Nanga de Un Monde Avenir, Maximilienne Ngo Mbe du Redhac, Hilaire Kamga, Me Agbor Balla, et bien d’autres membres de la société civile qui ont donné leur aval pour la signature de cette déclaration et dont leurs noms figurent au bas de la page. Par la même occasion, les membres de la société civile ne manquent de faire des recommandations à l’endroit du gouvernement, des recommandations qui vont dans le sens de la facilitation de l’accès à l’information, le respect des engagements pris par le Cameroun à l’international, la nécessité de revoir la loi sur le terrorisme, l’urgence de vider le dossier du journaliste Samuel Wazizi, protéger les journalistes, entre autres recommandations.