C'est notre histoire et Jorel Jacques Zang la raconte. Dans un post sur Facebook, il évoque le cas Ahmadou Ahidjo et Paul Biya.
Contrairement à la croyance populaire qui voudrait que le président Ahidjo avait décidé de quitter le pouvoir de manière volontaire et qu'il avait de manière délibérée de passer le témoin à Paul Biya, la réalité c'est que Ahidjo a été contraint de quitter le pouvoir grâce à un mensonge ficelé par la France et que Paul Biya n'était même pas son choix. En fait, Ahmadou Ahidjo considérait à la base Paul Biya qui était d'ailleurs un de ses plus proches collaborateurs comme un serpent à deux têtes malgré "sa soumission apparente".
Il disait d'ailleurs à sa deuxième épouse et ex-épouse d'un Libanais, la regrettée first lady Germaine Ahidjo (qui ne cachait pas du tout sa méfiance vis de Paul Biya), qu'il préférait garder ses ennemis très proches de lui pour mieux les contrôler. Cette façon de penser traduisait parfaitement l'état d'esprit du président Ahmadou Ahidjo face à ses collaborateurs et particulièrement face à Paul Biya qui était "très soumis" et un peu trop même aux goûts des autres collaborateurs du président Ahidjo à l'instar de feu Ayissi Mvondo qui va d'ailleurs lui assené une gifle mémorable en plein Conseil d'État et devant le président Ahidjo.
En effet, feu Ayissi Mvondo qui était d'ailleurs un grand bamiphobe trouvait que Paul Biya était une personne sans aucune personnalité et amorphe qui était prête à tout pour plaire au président Ahmadou Ahidjo, car peu importe les décisions prises par le président Ahidjo, Paul Biya ne voyait jamais rien à redire. Paul Biya était donc le seul de tous les collaborateurs, de manière systématique à dire oui sans rechigner à tout ce que disait le président Ahmadou Ahidjo dans une soumission totale.
Tromperie d'État. Suite à un bilan médical le 21 février 1981 à la Pitié salpêtrière en France, le président Ahmadou Ahidjo se sait désormais atteint d'un mal incurable qui lui donne juste quelques mois à vivre désormais. Il doit donc passer le témoin et régler les derniers détails pour une transition dans les meilleures conditions. Le président Ahidjo, sous les conseils avisés de son épouse Germaine, fait donc sa short list de "candidats potentiels" à présenter à la France et ils sont au nombre de trois et ils occupent tous des hautes fonctions dans son régime. Il s'agit donc de Mvondo Ayissi, George Ngando et Samuel Eboua. La France estime que tous ces candidats proposés ne sont pas assez "soumis" à son goût pour la continuité de la Françafrique.
L'apparition de Paul Biya. Très proche de Louis Paul Ajoulat depuis ses études en France et via également "l'aura" et la proximité de son épouse de l'époque feue Jeanne Irène Biya avec certains cercles du pouvoir français, le président Biya rentre au Cameroun et est proposé comme collaborateur au président Ahmadou Ahidjo par Ajoulat en 1962. Et c'est ainsi que Paul Biya va gravir naturellement les échelons de l'appareil étatique au Cameroun de "chargé de mission à la PRC" puis en cumulant les postes de SG/PRC et de DCC jusqu'à se hisser à la primature du Cameroun sous ordre de la France qui de manière sournoise et discrète était en train d'imposer Paul Biya à la présidence en remplacement d'un Ahmadou Ahidjo devenu "un peu trop panafricain" aux yeux du pouvoir colonialiste.
La short list d'Ahidjo est donc mise de côté et Ahidjo est sommé par la France de faire de son premier ministre son successeur constitutionnel. L'épisode de "la gifle" mentionné plus haut ne viendra que verrouiller ce projet français de gré à gré à la tête du Cameroun. Car bien que Ahidjo ne soit pas très enchanté de faire de Paul Biya son successeur, il se dit que la soumission de Paul Biya lui sera toujours favorable et ce d'autant plus qu'il reste le président du parti unique qui a donc la prééminence sur la présidence de la république.