Infos Sports of Thursday, 24 November 2022

Source: bbc.com

Coupe du monde 2022 : révélations de la BBC sur la longue bataille de la FIFA sur la bière

"Très décevant", déclare Jose, un supporter de l'Équateur

"Très décevant", déclare Jose, un supporter de l'Équateur, à propos de l'interdiction de la bière dans les stades de la Coupe du monde, alors qu'il rentre chez lui après le match de son équipe.

"J'ai eu celle-ci qui est à zéro [taux d'alcool], mais au moins j'en ai la saveur", dit-il.

"100 %. Il y avait des gens qui réclamaient de la bière", ajoute Emilio.

La décision de dernière minute de ne pas vendre de la bière dans les stades du Qatar découle de la dernière d'une série de batailles de longue haleine que la FIFA a menées au sujet de l'alcool.

Les querelles sur le sponsoring, qui remontent à plusieurs éditions de la Coupe du monde, ont déjà vu la FIFA être accusée de colonialisme et de faire passer l'argent avant la sécurité des supporters.

La politique d'interdiction de la FIFA

Bien que les récents problèmes de la FIFA concernant l'alcool aient tous consisté à essayer de persuader les pays hôtes de servir de l'alcool, l'instance chargée du football mondial exigeait autrefois qu'il n'y ait pas d'alcool dans les stades.

Jusqu'en 2004, son règlement pour les événements majeurs stipulait encore que les organisateurs n'avaient pas le droit de vendre de l'alcool à l'intérieur des enceintes et que toute personne sous l'influence de l'alcool serait expulsée des stades.

Mais la décision de l'instance dirigeante du football mondial de revenir sur cette politique et de faire pression pour que de l'alcool soit vendu lors des éditions de la Coupe du monde l'a mise en porte-à-faux avec certains pays hôtes.

Le Brésil inaugure la fin de l'interdiction des ventes d'alcool

Attribuer la Coupe du monde 2014 au Brésil semblait être un choix parfait.

Ce pays sud-américain, féru de football, a remporté cinq fois le tournoi et la bière y est très populaire.

Mais comme dans de nombreux pays, la passion des supporters brésiliens déborde parfois et engendre la violence.

C'est pourquoi l'alcool a été interdit lors des matches de football au Brésil en 2003, dans le cadre de mesures visant à lutter contre le hooliganisme et les bagarres entre supporters rivaux.

Mais Budweiser, partenaire de longue date de la FIFA, étant un des principaux sponsors du tournoi, il a été demandé sans détour aux organisateurs de modifier la loi relative à l'usage de l'alcool dans les endroits recevant du public.

"Les boissons alcoolisées font partie de la Coupe du monde, donc nous allons en avoir. Excusez-moi si je semble un peu arrogant, mais c'est quelque chose que nous ne négocierons pas", a déclaré Jérôme Valcke, alors secrétaire général de la FIFA.

"Avoir le droit de vendre de la bière doit faire partie de la loi", avait-il ajouté.

Le ministre brésilien de la Santé s'est opposé à ce changement. Marco Aurelio Garcia, conseiller spécial du président du pays, a qualifié M. Valcke de "clochard", de "colonialiste" et de "grande gueule".

Malgré les protestations, les organisateurs de l'édition 2014 ont cédé et modifié la loi pour autoriser la vente d'alcool pendant les matchs de la Coupe du monde.

Pendant la compétition, plusieurs affrontements ont eu lieu entre supporters rivaux, notamment lors du match de la Colombie contre l'Uruguay à Rio de Janeiro, qui a nécessité l'intervention de stewards pour séparer les supporters rivaux.

En réponse, Jérôme Valcke a déclaré à la chaîne de télévision sportive brésilienne SporTV : "J'ai été étonné par le nombre de personnes qui étaient ivres…"

Interrogé sur la possibilité pour la FIFA de modifier sa politique à l'avenir, il a ajouté : "Si nous pensons qu'il est nécessaire de contrôler [les ventes d'alcool], nous le ferons."

Pression sur la Russie

Mais la Coupe du monde 2018 en Russie n'a pas connu un changement majeur, concernant la règlementation de la FIFA relative à l'usage de l'alcool .

Comme le Brésil, la restriction de l'alcool lors des grands événements sportifs est une vieille histoire en Russie.

En 2005, le gouvernement a interdit la vente et la publicité d'alcool dans les stades.

Aucune grande marque d'alcool n'a parrainé les Jeux olympiques d'hiver de 2014 à Sotchi et, en 2012, la Russie a introduit une interdiction totale de la publicité pour l'alcool à la télévision, en ligne et dans les journaux.

Mais l'année suivante, le président Vladimir Poutine a signé une nouvelle législation pour autoriser la vente d'alcool lors des matches de la Coupe du monde, pour assouplir temporairement en même temps les nouvelles restrictions sur la publicité de la bière.

La région de Rostov a tenté d'interdire la vente d'alcool dans ses stades en considérant que ce sont des "zones de rassemblement de masse", mais elle a fait marche arrière lorsqu'elle a été menacée de poursuites judiciaires.

Objections religieuses

Les questions relatives à l'alcool et au football lors de grands événements ne concernent pas seulement la FIFA et les pays hôtes de la Coupe du monde.

Lors de l'Euro 2022, l'UEFA s'est heurtée au refus de certains joueurs de participer à des conférences de presse avec des bouteilles de bière de l'un des sponsors du tournoi, Heineken, sur la table.

Le milieu de terrain français Paul Pogba a retiré l'une des bouteilles de ladite société avant de répondre aux questions après un match.

Son compatriote Karim Benzema, qui, comme Pogba, est musulman, a également parlé à la presse sans qu'aucune bouteille ne soit visible.

Même si, dans les deux cas, les boissons fournies par les organisateurs du tournoi étaient de la marque Heineken sans alcool à 0,0 %, les deux joueurs semblaient s'opposer à être associés à un brasseur.

L'UEFA a par la suite accepté de demander aux entraîneurs et aux joueurs s'ils autorisaient les bouteilles Heineken sur leurs tables pendant les conférences de presse, mais elle a prévenu que les équipes pourraient se voir infliger une amende si elles snobaient d'autres sponsors pendant le tournoi.

L'interdiction du Qatar

Aujourd'hui, à l'occasion de la Coupe du monde 2022, les objections religieuses du pays hôte, qui impose des restrictions sur la vente d'alcool dans tout le pays, ont conduit la FIFA à accepter une interdiction de dernière minute de la vente de bière aux supporters dans les stades.

Les détenteurs de billets VIP peuvent toutefois continuer à acheter de l'alcool dans les loges avant, pendant et après les matches.

Reste à savoir comment cette décision affectera les relations de la FIFA avec le brasseur Budweiser AB InBev.

Sponsor majeur des tournois depuis les années 1980, il aurait payé environ 75 millions de dollars (environ 47,8 milliards de francs CFA) à la FIFA à chaque édition de la Coupe du monde.

Mais comme les États-Unis, patrie de la marque Budweiser, sont l'un des trois pays hôtes de la Coupe du monde 2026, AB InBev peut espérer avoir plus de chance lors du prochain tournoi.