Invité du journal de 13h sur la CRTV radio ce jeudi 24 août 2017, le Secrétaire permanent du Centre d’Études et de recherches en droit économique et politique du sport de l’Université de Yaoundé II analyse la décision de la FIFA de créer un comité de normalisation à la FECAFOOT.
«C’est un coup de théâtre qu’il y ait un nouveau comité de normalisation à la FECAFOOT, ça veut dire que nous sommes revenus à la case de départ sans certitude d’ailleurs que cette fois-ci le problème sera réglé. Parce que ce problème n’est pas simplement comme certains le pensent un problème de droit, c’est un problème qui est lié aux luttes de pouvoir aussi bien au sein de la sphère footballistique qu’au sein de la sphère politique en général.
On recommence à zéro parce que la FIFA s’appuie sur la sentence de la chambre de conciliation et d’arbitrage, puis sur celle du Tribunal arbitral du Sport. Mais ce n’est pas parce qu’on revient à zéro que tout est joué. Tout ce processus tourne autour des oppositions entre le droit camerounais qui s’applique aux organisations sportives d’une part, et puis de l’autre côté le droit international du sport notamment le droit de l’arbitrage sportif international parce qu’il y a manifestement des contradictions qui ont joué un rôle dans ce processus.
Si l’on s’en tient par exemple à la manière dont la chambre de conciliation et d’arbitrage a annulé le processus électoral à la FECAFOOT, il plusieurs aberrations dans ce qui s’est passé. Parce qu’en réalité, au fond, les élections n’ont pas été annulées en elles-mêmes.
Que ce soit les élections au niveau départemental ou régional, ou que ce soit même l’élection à la FECAFOOT elle-même pour le sommet. On a annulé l’élection parce qu’on a annulé les statuts. Et pourquoi on a annulé les statuts ? Parce que sur une centaine d’articles, il y avait un article qui n’était pas en conformité. Or il était parfaitement possible et plus raisonnable d’annuler partiellement ces statuts, sans invalider l’élection qui elle-même n’était pas en cause. Mais comme c’est une lutte d’intérêts, ça a permis à certains d’avoir le bon prétexte d’annuler tout le processus électoral.
Par ailleurs ce qui aurait dû être fait c’était d’annuler élection par élection. Or on a annulé les élections d’un trait. C’est une aberration. Si on prend la sentence du TAS, elle aussi pose problème parce qu’il y a des principes élémentaires en droit processuel. Lorsqu’une requête est déclarée irrecevable dans la forme, vous ne pouvez plus examiner le fond.
Or ce qui s’est passé c’est que le TAS dit que la requête présentée par Abdouraman est irrecevable parce qu’elle serait arrivée en retard, mais il dit quand même, et en réalité c’est superfétatoire, que ce n’est pas parce qu’on dit que la requête est arrivée en retard que la sentence de la chambre de conciliation et d’arbitrage est annulée. Là aussi c’est problématique. Et c’est pour cela qu’on ne serait pas surpris que certaines parties prenantes rentrent à nous dans le jeu du contentieux.
La FIFA n’est pas une juridiction, ensuite, la décision de mettre un nouveau comité de normalisation comporte au rang de ces motifs l’évocation de la sentence arbitrale du TAS. Or, cette sentence est manifestement le droit procédural suisse et peut donc s’exposer à être attaqué.
Je crois que dans les manœuvres le moment choisi par la FIFA n’est pas gratuit. Il s’agit manifestement d’un coup porté contre la possibilité que le Cameroun organise la CAN 2019. Même s’il n’y a pas de lien formel entre les deux situations, ce qui va être très difficile à la FECAFOOT avec un comité de normalisation de s’occuper à la fois de faire le travail de restructuration de la fédération et puis en même temps d’être impliqué avec les autres instances dans l’organisation de la CAN. Ce n’est pas une affaire de droit, mais une affaire de lutte d’intérêts et de pouvoir».