Beaucoup de Camerounais ont salué cette (sage) décision du Chef de l’Etat d’exiger que la caravane du trophée de la Can 2017, arraché de haute lutte par la sélection nationale fanion, s’ébranle dans les dix régions du Cameroun. Pour ces millions de fans des Lions indomptables, le premier sportif répare ainsi une injustice puisque des voix s’élevaient déjà pour critiquer le choix de Yaoundé comme l’unique ville hôte de cette fête populaire et historique que plusieurs Camerounais voudraient aussi partager.
En bon monarque, Paul Biya a donc infligé un contre-pied parfait à son ministre des Sports et de l’éducation physique, Pierre Ismaël Bidoung Mkpatt qui affirmait que ni les Lions ni le trophée ne ferait le tour des dix régions. Le chef de la délégation camerounaise en terre gabonaise justifiait sa sortie médiatique par le fait que les joueurs notamment les professionnels doivent impérativement rentrer dans leurs clubs respectifs conformément au calendrier de la Fifa.
Les Lions au front
Mais Paul Biya en a décidé autrement. Outre le Centre, la caravane va également s’ébranler dans le Littoral, l’Ouest, le Sud, l’Adamaoua, le Nord mais surtout le Nord-Ouest et le Sud-ouest, deux régions en crise depuis bientôt quatre mois. De sources dignes de foi, Bamenda constitue le premier stop de ce périple. Si d’aucuns voient en cette décision du chef de l’Etat, une envie de permettre aux quintuples champions d’Afrique de communier avec le peuple, il faut y déceler une volonté de l’homme-Lion de désamorcer en douce cette crise qui secoue la zone anglophone, non sans paralyser la quasi-totalité des activités.
Pour reprendre le contrôle de la situation, le locataire d’Etoudi qui manie désormais le canon à eau avec la même dextérité qu’il signe les décrets, espère profiter de ce sacre des poulains d’Hugo Broos pour résoudre le « problème anglophone » et d’ôter des cœurs et des têtes ce sentiment de ras-le-bol qui pousse les anglophones à défier les institutions.
Message à la jeunesse
Son discours aux Lions mercredi dernier au palais de l’Unité, annonçait les signaux de cette initiative pour laquelle il joue son va-tout. Présenté comme socle de l’unité nationale, cette équipe qui a mis tout le monde d’accord par ses récentes performances, fait oublier les tensions que connaît actuellement le pays dans sa partie anglophone. «Le Cameroun tout entier a vibré au rythme de vos exploits du Nord au Sud, de l'Est à l'Ouest. De Yaoundé à Douala, de Bamenda à Bertoua, de Garoua à Bafoussam, de Maroua à Buea, de Ngaoundéré à Ebolowa, votre victoire éclatante, obtenue avec panache a plongé les Camerounais dans l'allégresse…
Quand les Lions sont unis et solidaires, rien ne peut les arrêter », indiquait le président de la République dans son discours adressé à Benjamin Moukandjo et ses camarades. Le choix de Bamenda comme première étape de ce périple n’est donc pas un fait du hasard puisque ce 10 février, Paul Biya va s’adresser à la jeunesse.
Année blanche et sèche
Très attendu qu’il se prononce sur cette année blanche vers laquelle élèves et étudiants des zones anglophones sommés de marquer une longue pause à leurs études, s’acheminent inéluctablement. Le début du deuxième trimestre dans le système éducatif Camerounais est un échec dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest. Calme plat dans les établissements. Pour cause, plusieurs observateurs et analystes sont unanimes. Le désordre observé ici serait la résultante d’une incompréhension entre le gouvernement et les syndicats.
Des raisons qui mettent en péril l’éducation nationale. Le vide qui domine dans les salles de classe pousse élèves et étudiants à se poser des questions sérieuses sur leur avenir. Les Lions parviendront- ils à ramener la paix dans cette partie du pays? Paul Biya seul le sait.