J’y suis, j’y reste ! Déloge-moi si tu peux ! Pierre Semengue n’est pas du genre à lâcher du lest. Porté à la tête de la Lfpc en 2011, il estime qu’il n’a pas suffisamment donné à cette instance où il a atterri non pas par la voie des urnes mais par le pouvoir discrétionnaire du Chef de l’Etat qu’il appelle affectueusement son patron et « ami ».
Le général d’armée à la retraite confesse qu’il nourrit de grands projets pour la Ligue et que le seul moyen de transformer les promesses en actes c’est de se représenter, briguer un autre mandat de quatre ans au cours duquel il ferait mentir ceux de ses détracteurs qui estiment qu’il n’a rien foutue depuis son arrivée dans cette maison à problèmes.
C’est qu’à trop vouloir bien faire, il s’est pratiquement cassé le nez. Pierre Semengue est peut être allé vite en besogne. Lui qui rêvait de diriger cette instance comme on dirige une infanterie au champ de guerre où la notion de fair-play n’existe pas.
Grande muette
En fait, l’homme, plutôt que d’entreprendre la voix du dialogue à ses débuts, a voulu dresser les présidents de clubs comme on redresse des récalcitrants en leur imposant une gestion rigoureuse et une discipline de poigne. Sans tenir compte de la conjoncture économique et des pesanteurs, le général d’armée à la retraite, exigeait des clubs que le cahier de charges soit connu.
Les équipes devaient passer des contrats avec les joueurs, les entraîneurs, le personnel administratif et médical. Sans doute voulait-il rompre avec cette vieille époque où on pensait que la professionnalisation du football camerounais est l’affaire exclusive de l’Etat, de la Fécafoot, des clubs. Pierre Semengue souhaitait que les autres acteurs que sont les entreprises, les télévisions, les collectivités territoriales adhérent à ce projet et jouent eux aussi, leur partition.
Des ambitions louables certes, mais qui ont eu du mal à prendre corps au regard du manque de transparence et de l’environnement drastique dans lequel la Lfpc entendait poser les jalons de ce professionnalisme, chère au Minsep.
Aujourd’hui que son mandat est arrivé à son terme et qu’il souhaite briguer un troisième bail, plusieurs présidents de clubs rêvent de sang neuf. Au nom de ce professionnalisme que beaucoup ont salué, Semengue a certes beaucoup donné mais, il faut savoir partir. Candidat au moment où on veut de nouvelles personnes aux affaires, l’homme s’accroche sans doute parce qu’il a vu défiler devant lui des générations entières au sein de la Grande muette.
Actions héroïques
Sa longue et riche carrière pavée d’actions héroïques, de patriotisme et de lauriers sont là pour l’ennoblir. S’il a longuement marqué l’armée camerounaise, Pierre Semengue se sera révélé également aux Camerounais comme un inconditionnel de football. Président du Tonnerre Kalara Club (Tkc), il dirige un moment la (défunte) Ligue nationale de football (Linafoot) et se retire finalement de la direction du Tkc, et l’on entendra presque plus parler de lui dans la gestion du sport.
En 2011, l’homme de 76 ans se met en réserve de la République mais est porté à la tête de la Lfp du Cameroun. Une nouvelle structure dont le galop d’essai essuie des volets de bois verts de la part des acteurs du mouvement sportif mais aussi de la presse qui estime que Semengue n’est pas l’homme de la situation. Comme la plupart des problématiques liées au football, celle relative à la création d’une Ligue de football professionnel suscite des passions.
Entre crises, menaces de boycott du championnat et levée de bouclier dans les rangs des clubs, le général commence à comprendre l’immensité de la tâche qui l’attend. Désarmé par la fin de bail puis réarmé au nom de la continuité au sein du Comité de gestion provisoire que lui ont servi tour à tour Joseph Owona, à l’époque président du Comité de normalisation et tout récemment Tombi à Roko, le patron du nouvel exécutif qu’il a voulu tancer, Semengue n’est pas prêt à s’en aller. C’est pourquoi il devra battre le pavé sur un chemin jonché de ronces et d’embûches.