Opinions of Sunday, 30 March 2025

Auteur: Alex Kamta

Mécanismes de fraude électorale au Cameroun: voici pourquoi Paul Biya va encore gagné

Paul Biya, président du Cameroun Paul Biya, président du Cameroun

Depuis 1982, le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC) maintient Paul Biya au pouvoir grâce à un système électoral conçu pour annihiler toute alternance politique. Les élections présidentielles ne sont qu’une mascarade bien huilée où chaque étape du processus est biaisée, truquée et manipulée à l’avantage du régime en place.

Ce texte propose un décryptage minutieux des différentes étapes de fraude électorale, du recensement électoral jusqu’à la proclamation des résultats.

1. Le Recensement Électoral : La Première Manœuvre Frauduleuse.

Le premier verrou mis en place par le régime concerne l’enrôlement des électeurs, qui est loin d’être un processus transparent et accessible à tous.
Inscription sélective des électeurs :

- Les bureaux d’enregistrement ne sont pas ouverts dans les bastions de l’opposition ou ne le sont que brièvement, empêchant de nombreux citoyens de s’inscrire.

- Dans les fiefs du RDPC, des agents électoraux inscrivent plusieurs fois les mêmes électeurs sous différents noms au même endroit ou le même nom aux endroits différents.

- Les fonctionnaires et membres du RDPC sont priorisés, tandis que les jeunes et les populations considérées comme pro-opposition rencontrent des difficultés administratives (pièces d’identité refusées, longues files d’attente, etc.).
Fichiers électoraux truqués :
- Présence de milliers de noms fictifs ou de personnes décédées sur les listes électorales.

- Suppression volontaire de noms d’opposants ou de citoyens vivant dans des zones acquises à l’opposition.

- Des électeurs fantômes peuvent voter plusieurs fois dans différentes circonscriptions grâce à des cartes falsifiées.
2. L’Organisation des Élections : Un Processus Entièrement Contrôlé
Le Cameroun a mis en place un organe chargé de gérer les élections, ELECAM (Elections Cameroon), qui, en théorie, est censé être indépendant. Or, dans la pratique, ELECAM est sous l’emprise directe du régime.
Composition partisane d’ELECAM :

- La quasi-totalité des membres de l’organe électoral sont des cadres du RDPC nommés par le président lui-même.

- Les décisions sont prises en faveur du régime, sans recours possible pour l’opposition.

- Les représentants de l’opposition dans les bureaux de vote sont systématiquement écartés ou subissent des fortes intimidations.
Modification unilatérale des règles du jeu :

- À la veille des élections, des modifications arbitraires du code électoral sont souvent opérées pour restreindre la participation de l’opposition.

- Les délais de contestation sont volontairement réduits, empêchant tout recours efficace.

3. La Campagne Électorale : Un Terrain Déséquilibré
La période de campagne est marquée par une inégalité criante des moyens mis à disposition des candidats.
Utilisation abusive des ressources de l’État :

- Tous les moyens de l’administration publique (voitures, avions, finances) sont mis au service du candidat du RDPC.

- Les médias d’État (CRTV, Cameroon Tribune) font une propagande massive en faveur de Paul Biya, réduisant au strict minimum le temps d’antenne accordé aux opposants.

- Les gouverneurs, préfets et sous-préfets agissent en véritables directeurs de campagne du RDPC, utilisant leur autorité pour favoriser le parti au pouvoir.
Répression et intimidation des opposants :

- Les réunions et meetings de l’opposition sont interdits sous prétexte de troubles à l’ordre public.

- La police et la gendarmerie sont utilisées pour disperser violemment les rassemblements de l’opposition.

- Des leaders politiques et des militants sont arrêtés arbitrairement pour les empêcher de faire campagne dans certaines localités.

Achat des votes et corruption massive :

- Des bouts de pains, sardine, sacs de riz, du savon, des pagnes et même des billets de banque sont distribués aux populations pour les inciter à voter RDPC.

- Les chefs traditionnels sont instrumentalisés pour forcer leurs communautés à voter pour le régime en échange de faveurs ou de menaces.

- Dans certaines localités, les électeurs sont contraints de prêter serment sur la Bible ou le Coran pour garantir qu’ils voteront pour Biya.

4. Le Jour du Vote : Une Fraude Massive à Grande Échelle
Le jour du vote, le RDPC déploie des mécanismes sophistiqués pour truquer les résultats.

Bureaux de vote fantômes :
- Des centaines de bureaux fictifs sont créés où seuls des membres du RDPC peuvent voter, gonflant artificiellement le score du président sortant.

- Des bureaux sont délocalisés à la dernière minute sans préavis, empêchant ainsi de nombreux électeurs de retrouver leur centre de vote.
Vote multiple et bourrage des urnes :

- Des électeurs pro-RDPC votent plusieurs fois grâce à des cartes d’électeurs dupliquées ou sous différents noms.

- Des bulletins pré-remplis en faveur de Paul Biya sont directement introduits

- Les votes de l’opposition sont détruits ou remplacés par des bulletins pro-régime.
Absence de transparence dans le dépouillement :

- Les observateurs indépendants sont écartés des bureaux de vote sensibles.

- Les procès-verbaux de vote sont falsifiés avant d’être transmis aux autorités compétentes.

- Les résultats sont compilés dans l’opacité totale, avec des coupures de lumière, d’Internet et des menaces envers les lanceurs d’alerte.

5. La Proclamation des Résultats : Une Décision Déjà Connue à l’Avance
Une fois le vote terminé, c’est le Conseil Constitutionnel, lui aussi contrôlé par le régime, qui valide les résultats.

Manipulation des chiffres :

- Les résultats réels sont ignorés et remplacés par des chiffres fabriqués.

- Même dans les zones où l’opposition a remporté le vote, les scores sont inversés pour donner la victoire au RDPC.

Rejet systématique des recours :

- L’opposition, malgré les preuves massives de fraude, se voit systématiquement refuser ses plaintes sous prétexte de vices de forme.

- Le Conseil Constitutionnel, dirigé par des proches du président, homologue les résultats frauduleux sans hésitation.

Conclusion : Un Système Verrouillé, mais Pas Inébranlable

Depuis 43 ans, Paul Biya ne gagne pas des élections, il les organise à son profit. Cette machinerie électorale frauduleuse est une insulte à la démocratie et à la souveraineté du peuple camerounais.
Mais les peuples finissent toujours par se libérer. L’opposition et la société civile doivent redoubler d’efforts pour sensibiliser, mobiliser et combattre pacifiquement ce système. La prise de conscience populaire est en marche, et avec elle, l’espoir d’un Cameroun où le choix du peuple sera enfin respecté.