Le corps mutilé et martyrisé d’Arsène Salomon Mbani Zogo, dit « Martinez », directeur général de la radio privée Amplitude FM, basée à Yaoundé, et animateur vedette d’une émission quotidienne dénonçant l’affairisme et la corruption au Cameroun, est l’assassinat de trop. Nous nous souvenons de Samuel Wazizi, un journaliste anglophone travaillant pour une chaîne privée. Arrêté à Buea en août 2019, Wazizi couvrait le conflit dans les régions anglophones ainsi que des affaires de corruption. Début juin 2020, les autorités ont annoncé que Wazizi était mort en détention à une date indéterminée.
Le Cameroun, ce beau et grand pays, est en proie d’une terreur étatique. Des journalistes et des opposants y passent facilement de longues périodes derrière les barreaux, parfois sans jugement. Le Cameroun du clan Biya et de ses affidés est une dictature qui broie les libertés fondamentales et laisse les prédateurs des deniers publics agir en toute immunité.
La loi antiterroriste de 2014, qui autorise la détention indéfinie sans inculpation pour des infractions telles que « l’apologie des actes de terrorisme » dans les médias, est le levier principal utilisé par l’Etat camerounais pour terroriser les journalistes : au moins dix-huit journalistes ont été détenus ou contraints à l’exil depuis l’adoption de cette loi.
Nous relevons à ce propos deux paradoxes. Le premier concerne la multiplication des organes de presse et la désinformation qui s’ensuit : alors que les enquêtes factuelles sont pratiquement impossibles, de nombreux membres de l’élite au pouvoir ont en effet saisi l’occasion pour lancer des publications qui diffusent de fausses nouvelles visant à glorifier leurs propriétaires et à dénigrer leurs opposants. Deuxième paradoxe : c’est la répression ancienne de toutes les manifestations pacifiques, ainsi que de leur couverture dans les médias, qui a conduit à la situation insurrectionnelle dans les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest du Cameroun. Une pseudo liberté de la presse, de fait complètement illusoire et falsificatrice. Une politique autocratique de répression aveugle révélatrice d’un système de pouvoir perverti et nuisible.
La discrétion du gouvernement français s’inscrit dans une politique de compromission avec le régime Biya. Macron acceptant même de rencontrer le fils Biya en juillet 2022 lors de sa visite à Yaoundé ! Il n’est plus temps de se contenter de faire confiance aux autorités camerounaises pour mener à bien les enquêtes, le temps est désormais venu de condamner non seulement les atteintes à la liberté de la presse mais le système sous-jacent basé sur la violence et la corruption.
Le Parti de Gauche condamne cette politique africaine du gouvernement français actuel qui est indifférente aux souffrances de toutes celles et ceux qui résistent aux dictatures héréditaires et qui ne fera qu’aggraver le fossé qui est en train de se creuser entre nos peuples.