« Samuel Eto’o est toujours populaire, mais bien moins qu’au petit matin du 12 décembre 2021 quand il avait, et cela a échappé à de nombreux observateurs, battu le président sortant de la Fecafoot, Seidou Mbombo Njoya d’une courte tête.
Une courte tête, c’est bien peu après des dizaines de millions investis pour rallier des délégués, après avoir apprivoisé le sommet de l’Etat à la demande de la première dame, Chantal Biya.
Depuis son élection et nonobstant une débauche d’énergie à tout va, malgré une batterie de conseillers en communication allant de la dynamique patronne de Ascèse, Mme Fomekong, à l’expérimenté journaliste de Jeune Afrique Georges Dougueli, sa cote décline dans l’opinion, si bien que son principal rêve, celui un jour de diriger le Cameroun, s’évapore au jour le jour.
Samuel Eto’o a rapidement montré des limites managériales et intellectuelles qu’on essaie de dissimuler souvent derrière les expressions préférées de ses aficionados « fonceur », « déménageur », « laisser le travailler ».
Mais cette phraséologie dénote des limites structurelles et un penchant pour la dictature qui expliquent aujourd’hui pourquoi malgré une carrière au sommet, il traverse de grosses difficultés financières qui l’obligent à user de subterfuges pour tenter de rester le plus longtemps possible à la tête d’une institution qui lui garantirait des subsides et une certaine lumière indispensables à son quotidien.
Contrairement à ce qu’on lui a laissé croire, notamment ses conseillers politiques, à savoir jouer « le peuple contre l’élite » d’où ses déclarations appelant au soulèvement au siège de la Fecafoot à Tsinga pendant la campagne, les questions politiques au Cameroun ne se limitent pas à cette simple vue de l’esprit. Elles sont bien plus que profondes.
Évidemment qu’il est déjà hors course après sa condamnation en Espagne. Même s’il ne l’était pas, qui parierait un kopeck sur le succès de Eto’o à une campagne présidentielle ? Ses partisans sans doute.
Dans sa projection, Samuel Eto’o avait besoin d’un appareil politique et d’une rampe de lancement. Il a fait son choix : le pays Bassa, sa communauté, à qui il fait des fleurs à la Fecafoot et qui le lui rend bien. Or cet espace politique est animé et dominé depuis quelques années par le jeune et dynamique Cabral Libii et son PCRN. Il faut donc le neutraliser pour être seul à émerger, et pouvoir se lancer à la conquête du reste du pays.
Ce qui est surprenant, peut-être moins en réalité quand on tient compte de la jeunesse et l’immaturité politique de ses membres, c’est la stupidité des cadres du PCRN qui ont abandonné leur leader pour faire campagne pour Eto’o sans toutefois se rendre compte de cette incompatibilité politique.
D’Eto’o et de Cabral ne devra survivre qu’une seule tête politique. Il s’agissait donc bien d’une bêtise, exactement comme cette frange du MRC - les cadres les plus intelligents et tactiques politiquement parlant s’en sont démarqués - qui pour des raisons alimentaires ont abandonné Kamto pour les ors de Eto’o, une opération qui a montré au pouvoir combien Eto’o pouvait lui être utile dans la destabilisation du parti politique le plus bouillant sur la scène locale.
Ces cadres du MRC, doté d’un sens tactique et stratégique qui ont très vite vu le jeu de Samuel Eto’o ont réussi à protéger leur organisation et leur leader Maurice Kamto, de tout risque d’infiltration. Et par là consolidé l’assise idéologique de leur organisation.
La frange conservatrice du pouvoir Beti est également vent debout contre l’ancien pichichi, car elle se rend compte seulement maintenant de la manœuvre subtile de Eto’o - bien que vouée depuis à l’échec. Elle n’hésite plus à monter au filet, et cela peut se voir sur Vision 4, la chaîne conservatrice par excellence du pouvoir Beti.
Mbarga Nguele, Mbarga Mboa avec qui il est en affaires, Ferdinand Ngoh Ngoh et autres sont désormais à la peine.
Que dire de son entremetteur auprès de la « maman », Oswald Baboke ?
Les Nordistes, eux, intéressés par un retour au pouvoir après Paul Biya comme le martèle tous les jours un de leurs leaders, Guibai Gatama, en bisbilles ouvertes avec Eto’o, n’ont jamais songé à lui tendre véritablement la perche. Du moins ils sont rares.
Il semble même que l’attitude de Guibai Gatama à l’égard de Samuel Eto’o tient plus du politique que du football. Il a, de mon point de vue, repérer très tôt l’oiseau, et s’est armé de son caillou. D’où son expression « Le Liberia n’est pas Le Cameroun ».
Le passage du mandat de Eto’o à la tête de la Fecafoot, de 4 à 7 ans, au-delà des débats juridiques, consacre l’abandon de son ambition politique, l’échec de sa tentative de s’emparer du pouvoir à moyen terme.
Atangana Marcel »