Actualités of Monday, 8 October 2018

Source: internet.nouvelobs.com

Attente des résultats: Paul Biya fait figure de grand favoris

.Le président sortant, au pouvoir depuis 36 ans, fait figure de grand favori. .Le président sortant, au pouvoir depuis 36 ans, fait figure de grand favori.

Lors de l'élection de ce dimanche, le président sortant, au pouvoir depuis 36 ans, fait figure de grand favori dans un pays pourtant de plus en plus fragilisé.

C'est dans un pays fragilisé que plus de 6,5 millions de Camerounais sont appelés aux urnes, ce dimanche 7 octobre, pour une élection présidentielle sans grand suspense. En lice pour un septième mandat, Paul Biya, 85 ans dont trente-six au pouvoir, part en effet favori de ce scrutin à un tour. Le Cameroun fait pourtant face à de nombreux challenges : outre les violences, à la fois dans les régions anglophones de l'ouest et dans le nord du pays où sévit toujours Boko Haram, la situation économique ne convainc plus les instances internationales.

1- Biya vers un septième mandat

"Biya forever ?" Si "Jeune Afrique" maintient un point d’interrogation prudent dans le titre du dossier qu’il consacre à la présidentielle camerounaise, l’hebdomadaire voit déjà bel et bien le président Paul Biya, 85 ans, rempiler pour un septième mandat à l’issue du scrutin de ce dimanche 7 octobre :

"Il n’a pas vraiment fait campagne, ni prononcé de discours, ni même détaillé son programme… Et pourtant, le chef de l’Etat du Cameroun, au pouvoir depuis près de trente-six ans, a toutes les chances d’être réélu dimanche."

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Une analyse partagée par l’ensemble des observateurs, qui remettent toujours plus en doute le caractère démocratique du Cameroun. Sur le continent, seul Teodoro Obiang Nguema, président de Guinée équatoriale depuis 1979, est au pouvoir depuis plus longtemps que Paul Biya – qui est, lui, à la tête du Cameroun depuis 1982.

2- Des craintes sur la transparence du scrutin

Les candidats à la présidentielle ont exprimé à plusieurs reprises durant la campagne leurs réserves sur la transparence du scrutin de ce dimanche. Parmi les raisons qui motivent leur inquiétude figure notamment l’absence des observateurs de l’Union européenne (UE). Une première depuis le retour du Cameroun au multipartisme en 1990. Selon l’ambassadeur de l’UE au Cameroun, Hans Peter Schadek, Yaoundé n’a tout simplement pas envoyé d’invitation formelle à l’UE comme il est d’usage.

3- Un système cadenassé

En trente-six années à la tête du pays, Paul Biya a su verrouiller toutes les portes menant vers le pouvoir. Pour Fred Eboko, politologue camerounais à l'Institut de recherche pour le développement (IRD) cité par "Slate Afrique", la principale ambition de Paul Biya depuis qu’il est en poste est "la conservation du pouvoir". Pour Hans De Marie Heungoup, chercheur à l’International Crisis Group, cité dans le même article, le président camerounais a su mettre en place un système qui repose sur un "subtil équilibre des forces entre les différents corps des armées", "conçu dans son fonctionnement pour que tout le monde s’auto-surveille et soit entretenu dans des rivalités d’ethnies et de générations." Le président s’est également entouré, souligne le site, "de fidèles aux postes clés de l’administration". Ce qui a favorisé "un mélange de fatalisme et de clientélisme chez certaines élites politiques qui ont rallié le régime petit à petit", analyse Fred Eboko, de l'IRD.

4- Sept autres candidats

Paul Biya sera opposé à sept candidats ce dimanche. S'ils étaient huit au départ, l'un d'eux, l'ancien bâtonnier Akere Muna, fondateur de la branche camerounaise de Transparency International, a décidé, vendredi 5 octobre, de se désister et d'apporter son soutien à Maurice Kamto. C'est la première fois depuis l'élection présidentielle de 1992 que deux opposants de Paul Biya forment une coalition contre le président sortant. Joshua Osih, du principal parti d’opposition, le Social Democratic Front (SDF) ; l’ancien ministre Garga Haman Adji, de l’Alliance pour la démocratie et le développement (ADD), qui se présente pour la troisième fois (il avait terminé troisième lors de la présidentielle de 2011) ; l’avocat et ancien membre de la Commission du droit international des Nations unies de 1999 à 2016, Maurice Kamto, candidat du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) ; la figure montante du débat politique Cabral Libii, du parti Univers ; pour la quatrième fois, Adamou Ndam Njoya, de l’Union démocratique du Cameroun (UDC) ; le chef d’entreprise Serge Espoir Matomba, du Peuple uni pour la rénovation sociale (PURS) le pasteur pentecôtiste Ndifor Afanwi Franklin, du Mouvement citoyen national camerounais (MCNC).

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5- La crise dans les régions anglophones

C’est un pays sous tension qui s’apprête à accueillir ce nouveau scrutin. Des troubles agitent en effet les deux régions anglophones au nord-ouest et sud-ouest – rattachées au Cameroun en 1961 –, où, il y a un an, des séparatistes avaient proclamé une indépendance symbolique. Après plusieurs épisodes de violence, un couvre-feu a été prononcé à l’approche du scrutin présidentiel. Les transports, les débits de boissons et les activités de loisirs ont été suspendus et des forces sécuritaires ont été déployées dans les deux régions, où vit 20% de la population du pays. Craignant la reprise de combats comme en 1999 à Buéa ou en 2001 à Kambu, de nombreux habitants tentent de quitter la zone. L’ONU estime à 200.000 le nombre de déplacés des précédents épisodes de violence.

6- La pression de Boko Haram dans le Nord

Le pouvoir central doit également faire face à Boko Haram dans l'Extrême-Nord du pays. Si le conflit a baissé en intensité, les djihadistes continuent de faire des victimes à la frontière nigériane. Des violences auxquelles les forces armées répondent avec brutalité : fin septembre, la BBC authentifiait une vidéo montrant l’exécution de deux femmes et de deux enfants par des soldats camerounais. Des images virales qui ont marqué le monde entier.

7- Une situation économique compliquée

Longtemps résiliente aux chocs, l'économie camerounaise, "la plus forte et la plus diversifiée" de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (la Cemac, qui regroupe la République du Congo, le Gabon, le Tchad, la Guinée équatoriale, la Centrafrique et, donc, le Cameroun), "montre ses premiers signes de ralentissement", a indiqué dans son rapport annuel la Banque africaine de développement.

Certes, le pays dispose de nombreuses ressources naturelles, telles que le pétrole, le coton, le cacao ou certains minerais, et résiste à la chute des prix de celles qu’il exporte. Mais les troubles sécuritaires commencent à peser sur l’organisation des productions. Le nombre de pauvres augmente (+12% de 2007 à 2014) et le pays a perdu en attractivité en raison de problèmes de gouvernance : le Cameroun est classé 153e sur 180 pays dans l’indice de perception de la corruption 2017 établi par Transparency International, et 163e sur 190 économies dans le dernier rapport Doing Business 2018 sur la réglementation des affaires.

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8- La polémique Samuel Eto’o

La star du football camerounais n’a connu aucun autre président. Ou sans en avoir réellement conscience. A 37 ans, Samuel Eto’o a décidé de prendre ouvertement parti pour Paul Biya, au pouvoir depuis… trente-six ans ! Non-content d’annoncer sur le perron du palais présidentiel son soutien au président sortant, Samuel Eto’o a également appelé ses fans à réaliser le même choix que lui. Une prise de position qui lui a valu une volée de bois vert de la part des autres candidats… mais aussi du public camerounais qui a multiplié les attaques contre lui sur les réseaux sociaux.