Après près de deux mois de recherche, la Confédération africaine de football (Caf) a finalement jeté son dévolu sur le cabinet Roland Berger pour conduire les missions d’inspection au Cameroun, en vue de l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations (Can) de football 2019. L’information est contenue dans un communiqué rendu public ce 21 novembre 2017 par l’instance faîtière du football africain. Jusqu’ici, aucune mission d’inspection n’avait été faite en terre camerounaise en raison de ce que le nouveau président de la Caf avait modifié le mode opératoire jadis en vigueur, pour confier le rôle principal à un auditeur indépendant, afin d’assurer la «neutralité » et surtout la «transparence» dans ce travail préliminaire. Après avoir critiqué vertement les conditions d’attribution de la Can 2017, ainsi que les deux Can suivantes dont l’organisation a été confiée à la Côte d’ivoire et à la Guinée.
Mais qui est ce «monstre» qui détient le sort du Cameroun ? A priori, rien ne peut présager de lendemains brumeux pour le pays des Lions indomptables. La réputation de l’auditeur peut en être le gage fiable. Roland Berger est un des principaux cabinets de conseil en stratégie sur le plan international. Il est d’ailleurs présenté par le site internet consultor.fr comme «le premier cabinet de conseil en stratégie originaire d’Europe», mieux «le 4ème cabinet mondial». Porté notamment dans la banque, l'énergie, la grande distribution, Roland Berger s’est pendant longtemps concentré sur le marché européen, notamment en France et en Allemagne. C’est depuis 2010, avec le départ de la présidence du groupe de son créateur, que le cabinet engage la conquête du monde. En l’occurrence des bureaux l’Amérique latine, le Moyen Orient, l’Afrique et l’Asie ; mais aussi l’Amérique du Nord en visant spécifiquement le secteur de l’automobile. Une politique d’expansion qui a failli lui coûter son rachat, du fait d’une levée de capital mal ficelée. Roland Berger se ravisa et opta pour l’indépendance de son projet, avant de céder le directoire au Français Charles-Edouard Bouée. C’est ce dernier qui a subi les turbulences capitalistiques qui ont vu plusieurs cadres quitter la barque, notamment ceux des bureaux parisiens et belges qui avaient jusqu’ici pignon sur rue.
Sur le chantier laissé par PricewaterhouseCoopers
Avant de devenir simplement Roland Berger en 2015, le cabinet munichois né sous l’appellation Roland Berger Strategy Consultants, a plusieurs fois changé de dénominations : Roland Berger Marketing, Roland Berger & Partners, Roland Berger International. Le dernier changement n’a pas que tourné la page de son fondateur, mais ouvert une nouvelle ère pour le cabinet qui sortait péniblement de la crise née de son ouverture. «Nous nous organisons autour de trois lettres qui caractérisent nos activités : K pour "Knowledge", le conseil en stratégie, les services au gouvernement, le restructuring et les projets d'infrastructures complexes; T pour "Technology" dans une logique d'économie collaborative, à l'image de notre plate-forme Terra Numerata; enfin, C pour "Capital", sur certaines classes d'actifs», avait expliqué son patron au journal français Les Echos.
C’est ce géant du Conseil et de la stratégie qui va donc remplacer le cabinet britannique PricewaterhouseCoopers (Pwc) qui s’était désisté le 18 août dernier, à deux jours de la première visite d’inspection de la Caf au Cameroun. Dans un contexte de crise de confiance entre Ahmad, le président de la Caf, et le Cameroun, pays organisateur désigné depuis 2013 et par ailleurs pays de son prédécesseur. Le Malgache ayant a priori jugé que le Cameroun ne sera pas prêt le moment venu, et menaçant de relancer le marché de l’organisation de la Can querellée. Non sans modifier unilatéralement le cahier de charges, passant de 16 à 24 pays participants, pour six stades de jeu au lieu de quatre. Et des voix proches du cabinet devant désormais assurer les inspections, avaient laissé entendre que le patron de la Caf avait prescrit de tronquer les résultats de l’audit. Qu’en sera-t-il avec Roland Berger ?